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Pour un art pauvre, inventaire du monde et de l’atelier

04 Nov - 15 Jan 2012
Vernissage le 04 Nov 2011

Si l’appellation d’art pauvre (Arte Povera) désigne un mouvement artistique italien des années 60, elle peut aussi être considérée comme une attitude dont la présente exposition cherche la pertinence à une époque de surproduction des objets et des images, où la valeur marchande de l’art est souvent soulignée.

Karla Black, Katinka Bock, Abraham Cruzvillegas, Thea Djordjadze, Gabriel Kuri, Guillaume Leblon, Gyan Panchal, Gedi Sibony.
Pour un art pauvre, inventaire du monde et de l’atelier.

Si l’appellation d’art pauvre (Arte Povera) désigne un mouvement artistique italien des années 60, elle peut aussi être considérée comme une attitude dont la présente exposition cherche la pertinence à une époque de surproduction des objets et des images, où la valeur marchande de l’art est souvent soulignée. Tous sculpteurs, les huit artistes présentés portent une attention particulière au matériau dans une démarche ouverte qui lie fortement l’oeuvre tant à l’implication physique de l’artiste qu’au lieu qui l’accueille. Ces oeuvres incluent les concepts d’instabilité, parfois de fragilité, et presque «d’autoformation» tant l’oeuvre semble naître organiquement à partir du matériau choisi. Dans ce cas, la pauvreté ne fait pas seulement référence aux moyens utilisés et à leur origine mais à la parfaite superposition de la forme et des moyens.

Privilégiant souvent l’improvisation, les artistes tendent à ouvrir la frontière entre objet fini et matériau et relient le travail d’exposition aux procédures d’atelier. «Rouler, rabattre, plier…» On se souvient de la liste de verbes proposée par Richard Serra en 1967-68. Ces oeuvres semblent à leur tour s’intéresser aux gestes élémentaires ce qui n’exclut pas la finesse comme en témoignent les couleurs pastels chez Karla Black, l’élégance des rythmes et des formes de Gedi Sibony ou de Thea Djordjadze.

Plutôt qu’un produit terminé, l’oeuvre apparaît comme un procès, rappelant certaines expériences des années 70. Ces artistes choisissent des matériaux à portée de main : le polystyrène expansé, le plâtre, les produits de maquillage, le terreau, les tickets de caisse, le polyane, les chutes de contreplaqué ou de médium, souvent des matériaux d’emballage ou des fournitures trouvées à l’atelier. Certains faits sociaux, par exemple la rencontre des fumeurs, l’esthétique «moderne» de structures métalliques, bien ancrés dans la vie contemporaine, à leur tour, peuvent devenir des matériaux au même titre que la terre ou le bois. Réunissant des oeuvres récentes des artistes et pour la plupart des réalisations conçues spécifiquement, l’exposition porte une attention particulière au dispositif spatial. Mais dans le flux de la création, l’exposition est aussi un moment d’arrêt où la sculpture est possible.

Le point de départ est le matériau. La forme toujours importante est seconde par rapport au choix de la matière, d’autant qu’elle n’est pas toujours pérenne. Dès la première salle, Katinka Bock s’inscrit dans cette dualité. Ses matériaux habituels sont le ciment, la terre, la pierre, le métal et le bois. Kalender est un éphéméride constitué de 100 cubes de terre vernissée bleue dont les éléments sont posés au sol contre un mur. Chaque jour, un élément sera déplacé entraînant un lent mouvement de la pièce dans la salle d’exposition où s’inscrit le passage du temps dans l’exposition. Ein Grosser Kreis est un cercle inscrit dans l’espace contigu que forment deux salles des galeries inférieure et supérieure. La forme créée est la plus précise et la plus sobre, issue en fait de la simple géométrie pour relier ses espaces normalement perçus comme séparés. En rendant perceptible un détail de l’architecture non vue, l’artiste révèle la vérité constructive du bâtiment. Avec la même vérité, l’ellipse créée vient de la position des trois appuis sur lesquels repose le cercle : l’un des garde-corps, le sol, une poutre en bois qui a subi les intempéries extérieures pendant plusieurs mois dans le canal du jardin de la Fontaine. Le support de bois représente la nature alors que le cercle de métal est, lui, usiné. Ce dispositif entraîne aussi une participation du visiteur qui, dans ses déplacements, est tantôt dans, tantôt hors du cercle, passe tantôt sous, tantôt au-dessus du cercle

Dans les matériaux bruts interrogés, d’ailleurs, se trouvent aussi des formes culturelles mais contemporaines celles-là: tels que le design.

critique

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