ART | EXPO

Larsen

07 Nov - 07 Fév 2009
Vernissage le 06 Nov 2008

Cette exposition propose l’hypothèse d’une qualité intrinsèque à la citation, de la vertu de l’appropriation et du détournement.

Francis Baudevin, Édouard Boyer, Marcel Duchamp, Éric Duyckaerts, Sammy Engramer, Franck Éon, Richard Fauguet, Hans-Peter Feldmann, Sylvie Fleury, Frédéric Fourcaud, Hallgrimur Helgason, Pierre Huyghe, Pierre Jahan, Bertrand Lavier, Les ready-mades appartiennent à tout le monde ®, Philippe Parreno, Martin Tupper, Jens Wolf
Larsen

«Larsen» présente un ensemble d’oeuvres de la collection du Frac Poitou-Charentes autour d’une de ses pièces maîtresses, une Boîte en valise de Marcel Duchamp, rarement montrée depuis son acquisition en 1988.

Marcel Duchamp, précurseur de l’art contemporain au début du 20e siècle, réalise à partir de 1936 et jusqu’à sa mort en 1968 des boîtes à systèmes contenant des reproductions miniaturisées de ses oeuvres les plus importantes. La Boîte en valise de la collection du FRAC Poitou-Charentes, produite en 1966, est une oeuvre, image de l’oeuvre ainsi presque accompli.

Le principe duchampien du ready-made ayant, dans un premier temps, contribué à imbriquer l’art et la vie, on peut estimer aussi qu’il a constitué le ressort de bien des apparentes tautologies modernes et postmodernes. La posture interdisciplinaire de Marcel Duchamp, son entreprise indisciplinée de dédain des dogmes et des manifestes, des styles et des écoles, sa validation appropriationniste d’éléments de la réalité extra artistique, ont enjoint, au fil des décennies, les artistes à faire oeuvre de la (re)définition de leurs propres champs disciplinaires – peinture, sculpture, musique, danse, cinéma, littérature… – par l’introspection, l’expérimentation et l’exploration de leurs limites présupposées. La décennie d’après guerre est ainsi constitutive d’un Modernisme déjà tardif dont la finesse de Marcel Duchamp avait très largement anticipé la prise de distance par rapport aux utopies sociales et politiques.

A suivi le moment «hors limites» et protéiforme des années 1960 et 70 (Pop Art, Land Art, happening, Fluxus, performance, Body Art, Actionnisme Viennois, Nouveau Réalisme, Art Minimal, Art Conceptuel…) qui est celui de la véritable affirmation d’une spécificité de l’art contemporain redevable, elle aussi, des fulgurances duchampiennes. Cette période ouvrant sur le postmodernisme artistique des années 1980 et 90, est concomitante des premiers énoncés philosophiques de la postmodernité. Les artistes et les philosophes constatent de concert l’effondrement des idéologies, l’échec patent des utopies révolutionnaires, la fin des «grands récits».

Bien des artistes émergeants dans les toutes dernières années du deuxième millénaire, tels de humbles antihéros, sondent les interstices de l’ordre et des formes établies ou mettent en lumière le nivellement des valeurs culturelles. Éprouvant l’idée de fin de l’Histoire ou, du moins, l’épuisement d’une conception linéaire de l’Histoire et de ses avant-gardes, d’autres valorisent des esthétiques, des champs culturels et des modes d’expression jusqu’ici méprisés ou relisent en se les appropriant, en les mêlant, en les manipulant, des oeuvres du passé.

Pierre Jahan s’applique à documenter la circulation des oeuvres pendant l’Occupation puis à la Libération. À des fins de composition picturale, Francis Baudevin pompe le graphisme commercial gonflé de références à l’abstraction géométrique. Jens Wolf préfère peindre de faux anciens tableaux que de faux tableaux anciens. Philippe Parreno active un personnage de manga. Édouard Boyer augmente la visibilité du style du dessinateur de presse Willem. Éric Duyckaerts fait oeuvre d’une forme langagière professorale et de l’évocation d’un dispositif de médiation multimédia. Sammy Engramer soumet une narration à l’architecture de la page d’accueil d’un moteur de recherche Internet première génération.

Bertrand Lavier fait un film d’une peinture de Kasimir Malevitch. Déconstruisant le cinéma, Pierre Huyghe met en images la fabrication invisible du doublage des voix. Franck Éon réplique en vidéo la peinture de John Currin. Richard Fauguet problématise sa figuration de «héros» par le recours à des matériaux improbables. La prolifération d’images tient lieu de projet à Hans-Peter Feldmann. Pif, Captain America, Bonaparte, Sigmund Freud, Bouddha, Frédéric Fourcaud offre en sculpture, un panthéon du tout-venant. Détournant les Brillo Boxes de Warhol, Sylvie Fleury corse son propos sur l’image de la femme. Hallgrimur Helgason peint une mise en abîme iconique et médiatique de l’individu clownesque. Philippe Thomas disparaît derrière le nom commercial d’une agence de publicité, Les ready-mades appartiennent à tout le monde®, qui lance un casting pour nourrir l’histoire de l’art. Martin Tupper est à la fois commissaire d’exposition, artiste, fiction et pseudonyme

L’exposition «Larsen» propose l’hypothèse d’une qualité intrinsèque à la citation, de la plus-value de la copie et de la série, de la vertu de l’appropriation et du détournement.

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