DANSE | SPECTACLE

Affordable Solution for Better Living

12 Oct - 17 Oct 2018

Quand Théo Mercier et Steven Michel se penchent sur le cas Ikea, cela donne Affordable Solution for Better living. Un solo chorégraphique à l'humour vif, parfois inquiétant, qui décortique les effets de la standardisation. Des meubles, et des corps qui vivent avec et dans ces meubles.

Création 2018, le plasticien, metteur en scène et chorégraphe Théo Mercier présente Affordable Solution for Better Living. En collaboration avec le chorégraphe et danseur Steven Michel. Artiste faisant des allers-retours entre les disciplines (installations et spectacle vivant), Théo Mercier cultive un sens aigu des contextes et objets. Sur scène, Steven Michel partage ainsi la scène avec un étrange totem. Une Kallax. Soit une étagère Ikea, nommée Kallax. Alors qu’Ikea fête son soixante-quinzième anniversaire, Affordable Solution for Better Living [Une solution abordable pour un meilleur style de vie] démonte le standard pour une plongée chorégraphique dans les limites du design industriel. Solo, la pièce est interprétée par Steven Michel, danseur virtuose de la compréhension de la morphologie humaine. En témoigne son solo They Might be Giants (2016). Tandis qu’Ikea, en tant qu’enseigne de mobilier suédoise, propose des meubles design à bas-coût.

Affordable Solution for Better Living de Théo Mercier et Steven Michel : la vie en kit ?

De la rencontre entre Steven Michel, Ikea et Théo Mercier naît ainsi une question quant à la standardisation des mouvements. Les utopies industrielles modernes ont voulu démocratiser le meilleur, la pointe de la création humaine, en le produisant à la chaîne, pour le rendre accessible à tous. Avec son corolaire : la contribution de tous, sans exception, à l’élaboration d’une création humaine de pointe. Une circulation ambivalente qui se sera matérialisée, pour Ikea, sous la forme du kit. Le meuble design en kit, à monter soi-même. Chacun ayant ainsi une forme un peu singulière (bancale ?) du modèle idéal. Géant de l’ameublement, Ikea conjugue grande consommation et création actuelle. En témoigne sa nouvelle collaboration avec la société Little Sun (énergie solaire et solidaire), de l’artiste Olafur Eliasson. Mais aussi belles que soient ces intentions, cela n’oblitère pas les aléas. Comme la standardisation et l’appauvrissement des intérieurs, des rapports.

Du design industriel standardisé aux gestes organiques : l’inévitable singularisation

Sur scène, Steven Michel porte des combinaisons humaines. Tout son corps, visage inclus, est couvert d’une peau humaine (costumes créés par Dorota Kleszcz). D’abord un corps masculin — sculpté façon Ken, du couple Ken et Barbie. Puis un écorché — façon leçon d’anatomie. Un défi physique, notamment pour la respiration, que Steven Michel relève parfaitement. Moment d’humour, le personnage se retrouve aux prises avec du mobilier Ikea. À construire, déconstruire, reconstruire. Pour un style de vie médiocre, au sens d’Aristote ou Blaise Pascal — une moyenne en forme de summum de ce à quoi il est raisonnable d’aspirer. Seulement, le corps de l’entité standardisée déborde. Ça bouge, ça respire, ça ne peut s’empêcher de bousculer le tableau idéal. Et sur une musique électro composée par Pierre Desprats, la performance glisse alors dans l’organique. Du design industriel le plus policé à quelque chose de singulier. Pour une pièce dépoussiérante, qui ranime l’étonnement.

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