DANSE | SPECTACLE

Avis de Turbulences | Les Sauvages

25 Oct - 27 Oct 2018

Pièce chorégraphique pour cinq interprètes (un musicien et quatre danseurs), Les Sauvages, de Sylvère Lamotte, ausculte la texture des relations humaines. Surtout entre hommes, dans un contexte où la virilité fabrique la trame du groupe, de ses codes comportementaux.

Pièce chorégraphique pour cinq interprètes masculins, Les Sauvages, de Sylvère Lamotte (Cie Lamento), s’immerge dans la question du groupe. Sa constitution, ses forces, ses limites, son pouvoir inclusif ou exclusif. Portée par une musique électro sensible et habitée, composée par Youness Aboulakoul, la pièce s’empare également de la question de la virilité. En mettant en scène un groupe de jeunes hommes. Des êtres tantôt investis par leur image de puissance, tantôt réflexifs par rapport à cette construction potentiellement écrasante. Alternant ainsi les gestes, postures et emphases visant à maximiser l’occupation d’espace, et les moments de flottement, repli ou abandon. La présence prenant alors la forme d’un corps un peu hésitant, un peu seul, un peu voûté. Et entre ces deux pôles, le groupe comme lieu d’intensification du mouvement, comme interface critique, de galvanisation, de protection, ou d’éjection.

Les Sauvages de Sylvère Lamotte : l’individu dans le groupe, une gestuelle codée

Le rapport entre le groupe et l’individu particulier est rarement neutre. Ni en physique, ni dans aucune discipline s’intéressant au mouvement, telle la danse. Comme l’explique le chorégraphe Sylvère Lamotte, la création du spectacle Les Sauvages aura été motivée par une attention accrue à la place de l’individu au sein du groupe. Avec sa dynamique de ralliement et d’appartenance, surtout lorsqu’il s’agit d’ « un groupe d’hommes, avec ses codes, son langage et son comportement spécifique ». Côté chorégraphie, Les Sauvages oscille entre les genres. Avec des accents de danse hip-hop musclée, un peu effrayante. Telle qu’elle pourrait apparaître à travers le prisme d’un Å“il étranger. S’y mêlent également des évocations de scènes de rue, de soulèvement, d’arrestation. Sur des notes qui s’envolent parfois vers le bel canto, transformant alors la scène en peinture de la Renaissance. Est-ce une descente de croix ? L’évacuation d’un manifestant blessé ? Est-ce toujours la même image ?

Appartenance, dévoilement de soi et rites d’acceptation : un décryptage par la danse

Prenant le temps de ralentir l’instant du choc entre les êtres, Les Sauvages réintroduit de la narration. Par une exploration dansée où la lenteur laisse à l’œil le temps de se familiariser. Avec cinq interprètes (dont un musicien) qui partagent également, hors-scène, des souvenirs communs. Sur scène, Youness Aboulakoul, Jérémy Kouyoumdjian, Alexandre Bachelard, Jean-Charles Jousni et Gaétan Jamard interrogent connaissance de soi, d’autrui. « Ai-je conscience du changement qu’opère le groupe sur moi ? Jusqu’où aller avant de sortir du groupe ? » Et creusant cette trame de la virilité, du regard, de la fabrique du groupe, des marginaux et de la peur, Les Sauvages soulève voiles et pansements. Révélant au passage quelques blessures. « Quand tous les codes et les masques sont tombés, suis-je prêt à accepter l’autre pour ce qu’il est vraiment ? » Avec Les Sauvages s’esquisse ainsi les gestes, sensibles, qui dénotent volonté de rejet ou d’acceptation.

Itinéraire du spectacle (non exhaustif) :
– Festival Avis de Turbulences 2018, L’Étoile du Nord (Paris), du 25 au 27 octobre 2018.
– Festival Les Incandescences 2018, Mains d’Å’uvres (Saint-Ouen), le 5 avril 2018.

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