ART | CRITIQUE

Suicidal Tendencies

PLaura Houeix
@08 Nov 2008

Dans l’univers rock bigarré de Bruno Peinado le melting pot de culture est complet. Des références classiques aux éléments déco, en passant même par le simple motif usuel, tout est question de re-interprétation et de réseau. Une manière de faire violence, sans violence, au fond et à la forme des choses.

L’univers de Bruno Peinado est un monde à part entière; aux couleurs pop, à l’ensemble saturé et énergique. L’exposition de la galerie Édouard Manet est un microcosme, un laboratoire où chaque code établi, chaque figure prend le risque de se faire dévier de son rôle et de son sens.

Le terrain est balisé, les murs de la première salle recouverts de moitié par des bandes noires et jaunes donnent le cadre… Indéniablement, il s’est passé quelque chose ici. Sur les grandes plaques de verre laquées aux couleurs vives, un éclat, une fissure. Plus loin, des modules de tétris géants viennent de chuter sur le sol, pourfendant la matière lisse et laquée du métal. Ces matériaux et leurs formes viennent de se confronter à quelque chose… Laissant entrevoir dans leur impact leur épaisseur et leur matière, s’éloignant ainsi du produit fini et consommable pour redevenir matière.

Et quand Bruno Peinado ne s’attaque pas à la forme, c’est au sens qu’il s’en prend, toujours sur ce ton léger et amusant qui permet d’attirer l’œil malgré un minimalisme de rigueur. Le célèbre Smiley, est ici repris sur fond lumineux, figure bonhomme chargée de sens et d’histoire, qui n’a cessé d’être exploité. Il devient ici encore autre chose que ce symbole punk, devenu aujourd’hui une vingt-septième lettre de l’alphabet.

Il n’y a donc plus de hiérarchie dans ce travail qui joue à la fois avec les références de la sous-culture ou des milieux underground, tout en invoquant Sol LeWitt, l’art cinétique, le Pop Art ou encore Frank Stella. De cette mixité, chaque œuvre se nourrit, l’une face à l’autre, avec humour comme dans la dernière salle où une banane géante défendant le droit des pommes, côtoie une table en bois exotique reproduisant la carte de la Martinique.

L’artiste de se lasse pas d’utiliser les images existantes, comme il réutilise aussi ses œuvres. Ainsi l’exposition présente des travaux existants, remis en scène dans une configuration permettant un nouveau dialogue.
On se retrouve alors plongé dans une mixité de codes et de significations re-interprétés, métaphore même de son travail, puisque Bruno Peinado exploite sous toutes ses formes le réseau et ses ramifications, de la toile d’araignée à l’étoilement d’un impact.

Bruno Peinado
— Sans titre, 2008, Aluminium peint, découpé au jet d’eau haute pression. 150 cm.
— Sans titre, 2008, Verre feuilleté, laqué et brisé, contrecollé sur dibon. 170 x 85 x 1 cm.
— Sans titre, arrangements, 2008, Aluminium peint et plié. Dimensions variables.
— Sans titre, 2007. Wengé, noyer. 63 x 144 x 85 cm.
— Sans titre, 2008, Résine. Hauteur, 300 cm.
— Sans titre, 2008, Aluminium peint découpé au jet d’eau haute pression. 150 x 300 cm.
— Vue de l’exposition Suicidal Tendencies, galerie Manet, Gennevilliers, 2008. Techniques mixtes.

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