ART | CRITIQUE

Silvia Bächli – Helen Mirra

PMarie-Jeanne Caprasse
@27 Fév 2006

Loin des œuvres grandiloquentes, tonitruantes ou à la limite du kitsch qui occupent le devant d’une certaine scène de l’art contemporain, l’exposition qui réunit Silvia Bächli et Helen Mirra à la galerie Nelson, témoigne d’un art proche de l’ascèse, du pauvre et du peu, cristallisant dans la simplicité des mises en œuvre, un rapport très sensible au monde.

Devant les dessins à l’encre ou à la gouache noire de Silvia Bächli, l’attention se concentre sur la lecture des fragments, le repérage des indices. Tantôt les entrelacs ou les taches sombres évoquent une partie du corps ou un paysage, tantôt la composition plus abstraite laisse apparaître des réseaux de droites tracées à main levée qui donnent naissance à nos projections.

Si la ligne est sujet de ces dessins, les vides laissés sur le papier blanc sont tout autant les acteurs de ces jeux formels. En travaillant l’épure des formes et leur transformation en signes, l’artiste met l’accent sur un jeu de correspondances.

Faire dialoguer différents dessins pour mettre en résonance l’espace et le temps et faire émerger de nouvelles images est au fondement de la pratique de Silvia Bächli. Ici, l’accrochage est complété par une série de photographies de tables de bois recouvertes de neige réalisées dans le nord du Canada. Les lignes verticales et horizontales qui occupent l’espace du réel capturé par la photographie font écho aux lignes qui se superposent ou se croisent dans l’univers graphique très personnel de l’artiste. Ou quand le réel et l’imaginaire se répondent…

Avec les sculptures d’Helen Mirra réalisées à partir de bois de palettes de transport, la tonalité reste minimaliste. Si c’est également une artiste du «sensible», elle propose néanmoins une approche conceptuelle et philosophique de son travail où différents niveaux de lecture se chevauchent. Peint dans des couleurs sourdes (gris, bleu et vert), le bois de récupération parle d’une autre vie: celle de la forêt dont il émane, celle des voyages en train puis de la mise au rebus de ce bois à peine utilisé. Et lorsque l’on sait que ces œuvres ont été réalisées lors d’une résidence à Berlin, vient à l’esprit le lourd passé des trains du dernier voyage, ceux qui menaient aux camps de la mort.

L’économie des moyens réunit ces deux artistes qui, dans la concentration et le minimalisme, révèlent un rapport au monde éminemment fébrile.

English translation : Rose-Marie Barrientos
Traducciòn española : Maite Diaz Gonzàlez

Silvia Bächli
— Yukon (table et banc), 2004. Tirage Lambda couleur. 24 x 36 cm.
— Yukon (étagère et lit), 2004. Tirage Lambda noir et blanc. 24 x 36 cm.
— Sans titre, 2005. Gouache sur papier. 44 x 62 cm.
— Sans titre, 2005. Gouache sur papier. 44 x 62 cm.
— Sans titre, 2005. Gouache sur papier. 44 x 31 cm.

Helen Mirra
— Käuzchensteig / D, 2006. Bois, pigments naturels. 30 x 120 x 80 cm.
— Käuzchensteig / J, 2006. Bois, pigments naturels. 120 x 100 x 30 cm.

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