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Alga

Designer jonglant entre biodesign et approche semi-industrielle, Samuel Tomatis fait de la prolifération des algues vertes une opportunité. Avec la série Alga, il les transforme en outils, tissus, résines, meubles, luminaires, vaisselles... Petite incursion dans cette transmutation écologique.

Fraîchement diplômé (2016) de L’ENSCI (École nationale supérieure de création industrielle), Samuel Tomatis est déjà un designer aguerri. Avec notamment à son actif toute une gamme de produits développés à base d’algues. Soit la collection Alga (2016 – en cours). En partie présentée dans l’exposition se déroulant actuellement au Centre Pompidou Paris, « La Fabrique du vivant », dont l’ENSCI est partenaire, Alga conjugue diversité et homogénéité. Le principe est simple, sa réalisation beaucoup moins : utiliser les algues vertes proliférant sur les côtes bretonnes comme matériau de construction. Accueilli en résidence aux Ateliers de Paris depuis début 2019, Samuel Tomatis y poursuit le développement de ses recherches mêlant écologie, industrie et sciences. Si les débuts d’Alga avaient une dimension artisanale, à mesure qu’avance le projet se dessinent de nouvelles opportunités. À la base d’Alga un constat : l’eutrophisation est un problème récurrent en Bretagne. Et chaque nouvel épisode déclenche une nouvelle alerte sanitaire.

La série Alga de Samuel Tomatis : quand l’eutrophisation inspire le biodesign

L’eutrophisation ? C’est le phénomène qui désigne l’augmentation des éléments nutritifs présents dans l’océan, par déversement ou ruissellement de fertilisants agricoles (azote et phosphore), notamment. La conséquence la plus voyante de cette eutrophisation ? Une soudaine prolifération d’algues vertes, qui, lorsque échouées, se décomposent en émettant des gaz potentiellement toxiques. Que faire face à cette abondance de matériau végétal, plutôt considéré jusque-là comme un biodéchet ? La réponse proposée, et explorée, par Samuel Tomatis est de le recycler en matériel de construction. Luminaires, tissus, vaisselles, meubles, outils… Samuel Tomatis multiplie les expérimentations fructueuses. Depuis les années 2000, les ressources marines, comme les algues et le sel, retiennent de plus en plus l’attention des designers et artistes — cf. par exemple les travaux de Nir Meiri ou Sigalit Landau. Chacun à sa manière soulignant ainsi les modifications en cours dans les mers et océans. Également concerné, Samuel Tomatis développe pour sa part une réponse exploratoire et semi-industrielle.

Samuel Tomatis : une étude exhaustive des algues comme matériau de construction

Pour Alga, le designer Samuel Tomatis multiplie ainsi les associations avec artisans, chercheurs, scientifiques, biologistes et chimistes. De plus en plus attachée à la composition chimique des algues, la série Alga creuse le potentiel semi-industriel de ces masses végétales. Avec la création de nouveaux matériaux, entièrement composés d’algues. Une recherche qui inclut différentes variétés, pour l’élaboration de matières aux propriétés variées. Textures rappelant le papier mâché, entièrement biodégradables… Textiles tissés à partir de fibres d’algues, comme une sorte de lin marin… Mobilier rigide (chaise) utilisant un matériau aux allures de résine translucide, dans les tons vert émeraude… Dalles et carreaux aux densités, épaisseurs, degrés d’opacité et transparence, effets de matières et couleurs variés… Textures sombres et brillantes, oscillant entre cuir rigide et céramique… Avec Alga, Samuel Tomatis procède à une étude exhaustive de l’algue. Entre éco-conception, biodesign et ingénierie des matériaux : une expérience fertile.

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