ART | CONFERENCE

Robert Cantarella fait le Gilles

05 Sep - 05 Mar 2012

Robert Cantarella investit la ménagerie de verre tous les premiers lundi du mois autour du séminaire de 1981 de Gilles Deleuze dont les intonations, les hésitations, les toux sont redites à l’identique afin de «passer par un autre corps pour percevoir les jubilations d’une pensée à haute voix».

Robert Cantarella
Robert Cantarella fait le Gilles

Depuis plusieurs années, Robert Cantarella refait les cours de Deleuze avec un système d’oreillettes. Il répète mot pour mot les cours que le philosophe a donnés pendant plusieurs années à Vincennes et à Paris VIII.
Deleuze, une expérience par la voix :
«Passer par la voix est un des accès aux sens et à la sensualité, incarnés de façon provisoire, passagère, pendant la durée réelle d’un échange de cours. La théâtralité est réduite à son minimum. Je suis assis, des oreillettes de petits formats me font entendre la voix de Deleuze, je redis ce que j’entends au plus près de la voix d’origine, en refaisant les inflexions, les suspens, et les interventions. Chaque cours est de plus de deux heures.

J’ai d’abord écouté, puis j’ai voulu le faire passer par un corps, le mien, pour repérer les effets physiques d’une copie sonore. Gille Deleuze, lui-même construit sa séance à partir d’un cours préparé et improvise au contact des étudiants. Le rythme, la fréquence, le battement des idées en train de constituer par la voix s’entend, et se ressent. Je ne copie pas les attitudes ou bien une manière d’être, au contraire le texte traverse le passeur qui le retransmet avec la réalité de son corps et du grain de sa voix, dans une proximité qui, elle, peut rappeler les regroupements des cours d’origine.

Je n’ai pas assisté à ces cours. J’ai, comme beaucoup, découvert d’abord l’écriture, puis la voix de Deleuze, dans ce sens-là. La voix, comme moyen de transport m’a souvent facilité la compréhension, je dirai justement la sensation d’une idée, et surtout du chemin de son développement. C’est en jouant avec sa voix que peu à peu je me suis pris à le dire, puis à en faire une copie exhaustive.

Mon métier de théâtre me fait souvent dire à un acteur « dis un peu pour voir » et particulièrement quand le sens paraît bouchonner. J’ai pensé aux exercices de copie si habituels en peinture, et j’ai entamé des ateliers de copie sonore. La pratique, comme en peinture, est jubilatoire pour celui qui fait, et pour celui qui reçoit».

Robert Cantarella

critique

Robert Cantarella fait le Gilles

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