ART | EXPO

Raad o Bargh

19 Fév - 27 Mar 2009
Vernissage le 19 Fév 2009

Les oeuvres de "Raad o Bargh" (littéralement : « tonnerre et foudre ») présentent un panorama des pratiques riches et variées de l’art contemporain iranien, dont les différents supports et préoccupations (politique, poétique, humoristique ou satirique) sont à l’image de la grande diversité en Iran aujourd’hui.

Shirin Aliabadi, Maryam Amini, Ali Banisadr, Mahmoud Bakhshi Moakhar, Ala Dehghan, Shirin Fakhim, Bita Fayyazi, Shahab Fotouhi, Ghazel, Ramin Haerizadeh, Rokni Haerizadeh, Y.Z. Kami, Avish Khebrehzadeh, Laleh Khorramian, Farhad Moshiri, Behrouz Rae et Vahid Sharifian
Raad o Bargh

La galerie Thaddaeus Ropac propose une exposition collective regroupant le travail de seize artistes nés et, pour la plupart, travaillant en Iran. « Raad o Bargh » (littéralement : « tonnerre et foudre ») présente un panorama de pratiques riche et varié, dont les différents supports et diversité des préoccupations (politique, poétique, pop, humoristique ou satirique) sont à l’image de la grande diversité de l’art iranien aujourd’hui.

Avish Khebrehzadeh fait des dessins délicats et oniriques ainsi que des peintures sur lesquelles elle projette des animations dessinées à la main. Dans l’exposition, Falling Horse in Battle (2008) est une animation vidéo synchronisée projetée sur un diptyque. Tout en immergeant le spectateur dans un univers folklorique, l’artiste parle de la vulnérabilité humaine, l’aliénation, la mélancolie et la sentimentalité, exprimées très souvent à travers la relation entre l’homme et les animaux, ou entre l’homme et son environnement. Laleh Khorramian, aussi, utilise différents médias dont, très souvent, la technique monotype qui lui permet de dépeindre des paysages abstraits et pittoresques qui émergent de rêves récurrents et de mémoires d’enfance. Son travail possède une qualité envoûtée et théâtrale.

Dans un registre très personnel, Ala Dehghan exposera une série de petits dessins qui documentent son expérience quotidienne, avec tous les éléments qui s’imposent à sa pensée et sa façon de vivre. Les dessins sensuels de Maryam Amini illustrent un univers dans lequel l’érotisme et la féminité cohabitent avec une menace sous-jacente, rendu par la légèreté du trait, ponctué par des couleurs acidulées. Behrouz Rae, lui, utilise le dessin et la photographie pour exposer son propre monde intime. Bimester (In Bimester We Trust) évoque le délitement psychologique et la question de l’alter ego. Pour Rae, l’art sert de moyen d’émancipation, de libération thérapeutique, à travers lequel il peut exprimer les traumatismes d’une enfance tourmentée et d’une vie confrontée à l’autisme et l’anorexie.

Y.Z. Kami s’exprime surtout à travers le portrait, où il s’intéresse au rapport entre la personne physique et la quête spirituelle du sujet. Peints à l’huile, ses tableaux grand format aux tonalités sourdes dégagent une ambiance paradoxalement contemplative. Le penchant philosophique de l’artiste est souligné par la qualité de transcendance de ces portraits, qui semblent dépasser la tentative de rendre l’apparence du sujet pour sonder la nature profonde de l’existence humaine. Ses spirales de prière, configurées en cercles concentriques, symbolisent l’action tournante, supposément purifiante, des derviches sufis.

Ali Banisadr met l’accent sur le rôle joué par la photographie dans la recollection des événements, tout en évitant de s’en servir : pour lui, la photo risque de limiter une vision compréhensive et sensible des choses, et c’est pourquoi il utilise la peinture pour évoquer ses fuyants souvenirs d’enfance de la guerre d’Irak, ce qui lui permet d’y inclure également les sons et les odeurs. Il se réfère à la tradition perse de la miniature tout en empruntant des traits de style à l’art occidental.

Rokni Haerizadeh démontre une capacité étonnante de s’immerger dans le passé, dans la mémoire, la littérature et la tradition, tout en connaissant la culture populaire moderne. En grandissant dans la République islamique, il a été constamment amené à réévaluer son environnement, d’où un travail qui exprime le mécontentement social des iraniens. Rokni Haerizadeh se réfère à l’histoire et la littérature perses pour s’en servir de manière allégorique, en suggérant des parallèles avec le monde contemporain. Dans cette exposition, il est représenté par un tableau qui illustre un texte d’Ahmad Shamloo, un poète iranien contemporain.

Dans le genre pop, le travail de Farhad Moshiri est à la fois caustique, provocateur et humoristique. Il intègre des broderies et des matériaux récupérés dans des tableaux et des installations souvent inspirés par les ornements et les décors, par le monde du souk et les idées du marketing et du devenir-marchandise.

Travaillant dans la lignée du Pop Art et du Dadaïsme, Vahid Sharifian a forgé pour désigner son art le terme « Papa’ism », à entendre comme critique des deux mouvements. Ce qui ne l’empêche pas de jouer de leur vocabulaire en créant des œuvres excentriques, telles Last Part, une nouvelle série de petites sculptures, lesquelles seront accrochées aux murs, suspendues du plafond et posées sur des piédestaux.

Shirin Aliabadi, connue surtout pour ses photographies de jeunes femmes voilées vues dans des voitures et pour sa série Miss Hybrid, où de jeunes Iraniennes en tchador portent en même temps des cheveux faux blonds, maquillage et pansement chirurgical sur le nez, exposera une nouvelle série d’œuvres sur papier intitulée Eyes Only. Dans le même esprit que les Miss Hybrid, celles-ci montrent la façon dont les femmes iraniennes minent le conservatisme islamiste en s’appropriant les codes de beautés occidentaux. Ramin Haerizadeh manipule les photos et collages numériques pour créer un monde de contradictions et d’absurdités. Dans une série récente de collages, Today’s Woman, composée d’images trouvées et d’autoportraits, l’artiste propose une vision burlesque et satirique de la situation politique et sociale en Iran aujourd’hui.

Bita Fayyazi exposera une installation autobiographique, Goli’s Dowry, qui comprend sept malles encastrables traditionnelles, dont la plus petite fait exception et contient un pénis en plâtre infesté de cafards en céramique. Les malles sont recouvertes de sérigraphies montrant des événements ayant marqué l’artiste. Une autre malle contient un journal qui raconte les quarante années de mariage de Goli.

Utilisant des matériaux trouvés, Shirin Fakhim assemble des sculptures de taille humaine qui sont grotesques, drôles et dérangeantes. Ses Tehran Prostitutes sont un commentaire de l’hypocrisie qui entoure cette profession à l’intérieur d’un pays profondément moralisateur dans lequel les femmes sont poussées à la prostitution à cause d’une pauvreté en augmentation et de la violence domestique.

Ghazel produit des performances et des vidéos. Elle est connue pour ses courts autoportraits intitulés Me, commencés en 1997, et qui comportent désormais quelque 700 scènes qui montrent l’artiste en train d’accomplir des actions quotidiennes tells que s’allonger au soleil, faire du ski nautique, fumer une cigarette, et ainsi de suite, toujours habillée de la tête aux pieds d’un tchador. A la fois drôles et absurdes, ces œuvres traitent de questions importantes telles que l’identité, l’exil et l’intégration. Sa dernière performance dans cette série sera exposée sous la forme d’un tableau animé et encadré.

Shahab Fotouhi, également, s’exprime à travers des vidéos artisanales, dans un style documentaire. Ainsi, Direct Negotiation (2007) montre un chat en train de taper avec ses pattes sur une vitre fermée, comme pour attirer l’attention de la personne qui se trouverait dans la chambre obscure de l’autre côté. À la fois amusant et décourageant, le titre de cette œuvre pourrait faire penser à la difficulté éprouvée par l’Iran (ou ses interlocuteurs) dans ses échanges avec la communauté internationale.

Quant à Mahmoud Bakhshi Moakhar, il évoque l’histoire dans son installation The Blood of Our Young Martyrs Turns into Tulips (2008), où les martyres de la Révolution iranienne sont symbolisés par des tulipes rouges en néon (qui forme également le symbole du drapeau iranien). Le spectateur peut lui-même éteindre ou allumer ces œuvres, ce qui ajoute une dimension ludique à la gravité de cette œuvre.

Publication

Un catalogue, avec des textes de Vali Mahlouji et Olivier Reneau, sera publié à l’occasion de cette exposition, en partenariat avec les Éditions Jalou.

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