ART | EXPO

Projection animalières

16 Jan - 08 Fév 2014
Vernissage le 16 Jan 2014

Bouleverser, critiquer et estomper les frontières entre l’homme et les animaux, tel est le point commun qui relie les œuvres présentées dans cette exposition. Les artistes nous confrontent à une série d’objets hybrides et d’expériences insolites qui remettent en question les stéréotypes attachés au lien entre nature et culture.

Marion Laval-Jeantet, Benoît Mangin, Marcus Coates, Assaf Evron, Institute of Critical Zoologists, Jenny Kendler, Milan Metthey, Akosua Adoma Owusu, Tessa Siddle et Xaviera Simmons
Projections animalières

Présentée dans le cadre de la proposition curatoriale de Caroline Picard « Ghost Nature », « Projections animalières » est une exposition collective sur le thème de l’étrangeté du monde naturel. Elle part du postulat avancé par le philosophe britannique Thimothy Norton, qui affirme que la nature n’existe plus en tant qu’entité distincte, mais que l’humain est désormais totalement intégré à son maillage. Il est donc devenu impossible pour l’homme de réaliser ce désir Romantique de communion avec la nature en dehors de tout cadre humain. Même si ce désir persiste chez l’homme, il ne peut en réalité jamais être assouvi et représente une sorte de « bug ». Les installations, performances et projections présentées dans cette exposition explorent une dynamique qui se situe au croisement entre les sphères humaines et non-humaines.

Certains artistes utilisent le costume pour se transformer en animal, c’est notamment le cas de Milan Metthey, qui courtise des canards ou encore de Tessa Siddle qui incarne les loups de la série télévisée Game Of Thrones (le Trône de Fer). Cette incarnation animale, ne sert pas à mettre en scène une sorte de fable à l’usage des humains, mais permet à la démarche artistique de rejoindre l’esprit animal et de s’identifier à lui.

Art Orienté objet (Marion Laval-Jeantet et Benoît Mangin) va encore plus loin dans cette identification en associant l’animal au corps de l’être humain de façon interne. Que le cheval vive en moi (May the horse live in me) présente des documents retraçant la performance des artistes en train de pratiquer une transfusion de sang de cheval à un humain. Dans ces efforts pour se lier à des êtres non-humains, Milan Metthey, Tessa Siddle et Art Orienté objet cherchent en réalité à transcender notre vie anthropocentrique. Même si elles risquent à tout moment d’échouer, ces tentatives remettent en question des préjugés bien établis sur ce qui est, et ce qui n’est pas naturel.

Le film d’Akosua Adoma Owusu, Anance, qui évoque la fable d’un homme-araignée, se situe entre deux genres: la biographie et le mythe. Jenny Kendler présente, quant à elle, un livre où la fourrure remplace le texte, ainsi qu’un coquillage nautilus où poussent des cheveux. Ces objets insolites sont à cheval entre le monde animal et le monde humain, leur hybridité rendant toute catégorisation complexe, voire impossible. Le coquillage pourrait être perçu comme le résultat d’une contamination radioactive. Quant au livre, il propose un argument indéchiffrable pour l’humain, seule espèce douée d’intelligence et de langage. Ses pages qui contiennent une langue méconnaissable, même si appréhendable par son aspect tactile, déroute l’esprit humain.

L’Institute of Critical Zoologists installe un piège à abeilles en se servant de peinture bleue comme appât. Ce geste minimaliste propose un signe visuel pour tenter de communiquer dans deux langues différentes, qui seraient accessibles aussi bien pour l’homme que pour l’abeille. Posée sur le sol comme un corbeau ou un scarabée endormi, la sculpture sur bois d’Assaf Evron fait passer un modèle algorithmique de couleurs d’un espace digital à un espace littéral. Ses limites se définissent par la capacité réduite de l’ordinateur à produire certaines couleurs. Mais dans un espace physique, séparé de son origine, il devient un objet impénétrable dont la logique intérieure et formelle semble naturelle.

Les animaux fournissent à l’expérience humaine des métaphores, des symboles et des signes; inversement leur comportement est appréhendé à travers le filtre des mœurs et des valeurs humaines. En les passant au crible de la culture humaine, on élimine leur étrangeté et ils deviennent ainsi des objets de mythe, fixes, statiques, représentant un idéal plutôt que la réalité.

En reflétant, critiquant, estompant et bouleversant les frontières entre ce qui est humain et ce qui ne l’est pas, les plasticiens présentés ici soulignent l’énigmatique fluidité du paysage naturel que nous habitons.

Ces expositions seront accompagnées d’un catalogue à paraître au printemps 2014, avec des textes de Joao Florêncio, Nettrice Gaskins, Graham Harman, Timothy Morton, Laurie Palmer, Claire Pentecost et Caroline Picard.

Commissariat
Caroline Picard

Vernissage
Jeudi 16 janvier 2014 à 18h

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