ART | EXPO

Philippe Decrauzat

27 Mar - 30 Avr 2010
Vernissage le 27 Mar 2010

Que ce soit à travers ses toiles ou ses vidéos, Philippe Decrauzat engage le spectateur physiquement en l’immergeant dans une expérience perceptive qui le place dans une véritable déconstruction, par l'ondulation d'un motif ou un effet stroboscopique. 

Communiqué de presse
Philippe Decrauzat
Philippe Decrauzat

La galerie Praz-Delavallade présente la troisième exposition personnelle qu’elle consacre à l’artiste suisse Philippe Decrauzat. 

La première salle de l’espace de la rue Louise Weiss est occupée par une installation composée de cinq toiles provenant d’un développement ondulatoire continu coupé en cinq séquences différentes: cinq Shaped canvas. Le châssis suit l’ondulation du motif, mais en partie seulement, sur ses côtés, il est tranché net.

Comparée aux tableaux de la même série, la logique déductive n’est plus conservée, le châssis n’est déduit du dessin qu’en partie. Chacune des toiles est comme une séquence, l’extrait d’un tracé plus long. Elles sont ensuite permutées et disposées dans l’espace de façon non continue. Philippe Decrauzat formalise l’illusion à travers l’utilisation d’un motif ondulatoire, cinétique issu du vocabulaire de l’Op art qu’il combine aux shaped canvas de grand format. Il engage ainsi le spectateur physiquement en l’immergeant dans une expérience perceptive qui le place dans une véritable déconstruction, un arrêt sur image. 

Dans la disposition des toiles, la façon d’envisager les tableaux est proche du montage cinématographique et révèle l’intérêt de l’artiste pour le film expérimental et les technologies de la vision. 

Or, la notion de la réception est au coeur des problématiques de ce cinéma. C’est d’ailleurs ce que Philippe Decrauzat explore dans son troisième film présenté dans la seconde salle. 

Comme dans ses films précédents, il construit son film sans caméra, c’est-à-dire à partir d’images provenant d’autres sources, ici, Rashomon de Akira Kurosawa (1950) dont il extrait des séquences qu’il remonte ensuite. Rashomon développe une narration non linéaire dans laquelle on explore différentes versions et interprétations d’un même événement: un crime.

Les images choisies sont issues du moment où se déclenche le récit. L’action se situe dans le cadre d’une forêt, la caméra fixe le soleil à travers les arbres. Ces plans sont utilisés dans le film de Kurosawa comme transition et marquent un changement d’état: passage du conscient à l’inconscient pour le personnage féminin, retour en arrière pour les témoins.

Philippe Decrauzat utilise ces plans où la caméra fixe le soleil à travers des arbres pour les retravailler: les contrastes sont poussés, les nuances gommées pour arriver à un rapport plus graphique, plus abstrait. Ces plans rassemblent certaines des préoccupations de l’artiste et son intérêt pour la pulsation lumineuse et n’est pas sans rappeler les circonstances dans lesquelles Brion Gysin a eu l’idée de la Dream Machine. Le montage crée ensuite un effet stroboscopique, une pulsation syncopée qui implique le spectateur au niveau de la perception de façon physique (effet flicker) 

L’éblouissement, l’expérience même de regarder le soleil a toujours été liée à l’étude des phénomènes visuels et du fonctionnement de l’oeil. Ces plans de Rashomon convoquent une histoire de la vision qui prend comme base d’expérimentation, l’observation du soleil et renvoie au processus même de la projection cinématographique. 

Dans le second espace de la galerie, rue Duchefdelaville, Philippe Decrauzat reprend cette partition de variations lumineuses (du noir au blanc et du blanc au noir) dans une série de toiles rayées. Par un effet de dégradé, comme par l’ajout de calques allant du noir au blanc, il formalise une transition visuelle, un mouvement. 

Une sculpture monumentale: Man The Square est présentée en parallèle. Il s’agit d’un plan incliné traversé par un trou dont le motif provient d’une planche photographique de Muybridge où le personnage en sautant s’accroche aux fils qui composent la grille pour mesurer le mouvement, créant ainsi une distorsion dans la structure. Comme souvent dans son travail, il s’intéresse aux éléments à la frontière entre deux et trois dimensions. Le titre Man The Square est une référence à un document de Claude Bragton étudiant également le passage d’un élément en volume au travers d’une surface.

critique

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