DESIGN | OBJET

Gemini

À la pointe du biodesign et du design biodigital, le Mediated Matter Group et Neri Oxman (MIT Media Lab) développent des pièces toujours plus pointues et séduisantes. Tel le fauteuil Gemini (2014) : une expérience acoustique proche de l'enveloppement fœtal.

Actuellement exposé dans « La Fabrique du vivant », au Centre Pompidou, le Mediated Matter Group cultive un design à la lisière du biodesign et du design biodigital. Autrement dit, un design s’inspirant autant de la nature qu’il inspire les processus biologiques. Fondé en 2010 par l’ingénieure et designer Neri Oxman, Au sein du MIT Media Lab, le Mediated Matter Group développe notamment de nouveaux matériaux bio-artificiels. Dans « La Fabrique du vivant », les publics pourront ainsi découvrir quelques Aguahoja Artifacts (2015-2018). Soient diverses pièces développées à partir d’impressions 3D en matériau biodigital. Un composite de cellulose (glucide du bois) et chitosane (molécule présente dans les exosquelettes des insectes et crustacés). Et tandis que la London Design Biennale vient juste d’annoncer le thème de sa troisième édition en 2020 — Résonance —, voici l’occasion de redécouvrir une pièce antérieure du Mediated Matter Group : le fauteuil Gemini (2014).

Gemini du Mediated Matter Group et Neri Oxman : une expérience acoustique

Quel rapport entre la résonance et le fauteuil Gemini ? Sous ses allures organiques et baroques, la chaise Gemini cache une expérience acoustique. Entre ventre de la mère (jumeaux) et constellation (gémeaux), Gemini joue sur les échelles pour inspirer le mouvement d’enveloppement. Dans l’espace utérin, le fœtus perçoit les bruits de son corps et de celui de sa mère. Un univers sonore singulier que retranscrit la chaise Gemini. La coque, ou conque, en bois sculpté modèle ainsi l’espace sonore de l’utilisateur-trice. Chambre semi-anéchoïque, les sons externes sont partiellement filtrés, laissant davantage de place à la réverbe interne. Une composante renforcée par le matériau qui tapisse cette enveloppe en bois. Texture hétérogène, l’intérieur est ainsi recouvert de bulles, ou villosités, imprimées en 3D. Une sorte d’épiderme cellulaire souple, composé d’un matériau absorbant les sons. Et si les couleurs du revêtement interne varient, c’est aussi parce que le matériau est hétérogène.

Bois et impression 3D : un univers calibré au nanomètre, pour le confort sonore

Le fauteuil de Neri Oxman utilise la technologie Connex3 du fabricant d’imprimantes 3D Stratasys. Sa particularité ? La possibilité d’imprimer en plusieurs matériaux et couleurs, simultanément. La peau interne de Gemini est ainsi imprimée en quarante-quatre matériaux différents. Avec un jeu de paramétrages où varient non seulement les couleurs, mais aussi les degrés de rigidité et d’opacité. Et ce, de façon à moduler les caractéristiques acoustiques, par la variation des contraintes géométriques et structurelles. Si la forme du bois accentue l’écho interne, à l’échelle des villosités, le son tend à rebondir entre les cellules colorées. Jusqu’à l’absorption. Tandis qu’à l’échelle nanoscopique, les matériaux digitaux employés ont des caractéristiques d’élasticité remarquables. Permettant ainsi de moduler la souplesse d’une part (et le rapport tactile à la matière), mais aussi les degrés d’absorption des sons en fonction de la courbure. Pour un design sensible, attentif à l’univers sonore.

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