ART | EXPO

Les Jeux funéraires

02 Avr - 30 Avr 2011
Vernissage le 02 Avr 2011

L'exposition "Les Jeux funéraires" de Julien Audebert à galerie Art: Concept  présente trois nouvelles œuvres qui convoquent la sculpture, le cinéma et la photographie. Ces œuvres sont liées entre elles par leurs thématiques iconographiques ou sources d’inspirations.

Julien Audebert
Les Jeux funéraires

Pour sa seconde exposition personnelle à la galerie Art: Concept, Julien Audebert livre trois nouvelles œuvres qui convoquent la sculpture, le cinéma et la photographie. Ces œuvres sont liées entre elles par leurs thématiques iconographiques ou sources d’inspirations.

Julien Audebert brasse un vaste panel chronologique et croise différents domaines des sciences humaines et sociales. Les faits et les récits qui font ici œuvre ont été puisés aussi bien dans notre époque contemporaine, que dans l’Histoire, la mythologie grecque, l’archéologie ou les antiquités orientales.

Les parallèles établis par l’artiste sont autant intuitifs que formels, ils révèlent et ajoutent une part de fiction au savoir produit par ces disciplines.

L’artiste juxtapose et nivelle ainsi les méthodes, outils et moyens d’expliquer, de représenter, de témoigner d’une culture ou de donner à voir a posteriori un événement. Ainsi se côtoient des fragments culturels hétérogènes — Babylone, la Grèce antique et le Far West américain — et la possible imagerie qui en découle: que ce soit au travers de l’écriture (en tant que contenu et élément purement visuel ou plastique), des vestiges archéologiques, des reconstitutions tridimensionnelles ou d’autres représentations picturales ou photographiques.

The Searchers (en français: La Prisonnière du désert de John Ford, 1956), dont le titre est l’éponyme du film qui constitue le point de départ, est une vue panoramique de paysage reconstruit à partir d’images du documentaire sur le tournage du film. Audebert désenchante le processus cinématographique, la fiction en train de se jouer et l’envers de son décor occupent un seul et même espace-temps: celui de la photographie qui, de façon inverse, rend invisible les techniques et les procédés du montage dont elle résulte. Le format invite le spectateur à balayer l’ensemble, à laisser son regard circuler horizontalement, d’un côté à l’autre de l’image, puis à s’approcher du centre de l’image qui tel un point focal attire l’attention.

L’artiste procède par une approche métonymique à déconstruire et reconstruire le cinéma – s’attaquant au contenu et au contenant – afin de questionner la fabrication du mythe et de l’imaginaire collectif américain.

Les nécessaires imbrications de points de vue et les déplacements concentriques se retrouvent dans les sculptures Chant 23 (la course de chars) et Sandbagwal. Dans la première, l’action décrite dans le passage de L’Iliade de Homère ordonne la forme de l’œuvre. Une pellicule 70mm à défilement horizontal a été choisie comme support de ce texte antique. Il n’est pas question de projeter ce film, dont ne résulterait d’ailleurs qu’une ligne horizontale, blanche et scintillante d’une durée de quelques secondes, mais plutôt de faire déambuler le spectateur, littéralement de le faire tourner, comme les chars dans l’arène. L’ensemble est donc régi de façon cohérente, comme si le texte devenu indissociable de la pellicule, avait généré sa propre forme – en l’occurrence, celle d’une spirale qui laisse visible la totalité du texte enroulé.

Tel un contre-pied de son œuvre Inside the Letter (the Clue) (2008) où le visiteur se déplaçait dans un labyrinthe dont la longueur totale des murs répondait à celle du texte de La Lettre Volée d’Edgar Poe. Pour déchiffrer le texte de Chant 23, le spectateur doit au contraire se déplacer autour du texte.

Enfin, Sandbagwal, sculpture et installation in situ, a été érigée avec ambivalence comme une anastylose ou une fortification militaire. Audebert a choisi de reproduire à grande échelle un détail de la célèbre Porte d’Ishtar commandée par Nabuchodonosor II pour sa cité de l’antique Babylone. Ironie du sort qui a motivé le choix de l’artiste: ce site archéologique se situe aujourd’hui en Irak et est recouvert par une base militaire américaine nommée «Camp Alpha». Dans un article paru dans le journal Le Monde en 2007 («Quand Babylone s’appelait Camp Alpha», édition du 16 août 2007), il est d’ailleurs question de sacs remplis par les militaires avec la terre récupérée sur ce site potentiellement riche de vestiges archéologiques. Ainsi Audebert imbrique savoir et fiction: les ruines de Babylone étant potentiellement éclatées dans des sacs ici rassemblés pour constituer le motif d’un lion en marche.

critique

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