ART | CRITIQUE

Lawrence Weiner. 1/2 Empty – 1/2 Full

PLaurent Perbos
@13 Fév 2009

L’une des figures majeures de l’Art Conceptuel, Lawrence Weiner, crée, avec sa nouvelle série 1/2 Empty – 1/2Full, une fois encore des peintures murales aux discours minimalistes où de jeux de regards et suscitent une interaction intellectuelle et sensible avec les spectateurs.

La salle semble éclairée en bleu. Persistance retienne: la lumière orange qui baignait la pièce attenante influence la vision que l’on se fait de l’ensemble. Les «fresques» peintes par Lawrence Weiner sont au premier abord peu visibles. Petit à petit les effets s’estompent et l’on découvre des formes géométriques et des mots.

1/2 Empty-1/2 Full. De quoi nous parle-t-on ? Les inscriptions en lettres argentées sont encadrées de rectangles vides. Les diagonales qui les coupent en deux impliquent un sens de lecture descendant. Le regard est guidé de haut en bas jusqu’à des mots «Whatsoever», «Whensoever», «Wheresoever», «Howsoever» qui semblent vouloir répondre à nos interrogations devant tant de mystère.
Et pourtant, ces étranges énoncés restent en suspend. Doit-on projeter une multitude de possibles ? Doit-on envisager et concevoir mentalement notre propre oeuvre d’art ?

Si chez Lawrence Weiner la lettre est envisagée et manipulée dans sa dimension abstraite, pour sa forme littérale et sa substance physique, son sens n’est pas évacué. Signe plastique et linguistique ne font qu’un.
Le langage présente un double aspect. Il fait à la fois appel à la typographie et à des phonèmes, des sons. Il véhicule aussi un message, un concept qui l’ancre directement dans l’intellect. Les artistes conceptuels se sont tournés vers ces champs de possibles et ont parfois déploré que la forme plastique, l’incarnation du concept, ne soit pas à la hauteur de son potentiel.
«Lorsque je présente une oeuvre avec des mots, explique Lawrence Weiner, cela comprend les associations propres à la langue, les doubles sens, et l’indication des matériaux. Le travail, la pièce, c’est seulement la langue, les mots, plus tous les matériaux auxquels il est fait référence».

La matière est en trop, sa réalité constitue un excès et l’artiste préfère alors l’éviter. Le passage à l’objet paraît inutile, désuet; seule la couleur, elle, persiste.
Selon trois principes théoriques de l’art conceptuel, l’artiste peut construire le travail, le travail peut être réalisé par quelqu’un d’autre, et le travail ne doit pas nécessairement être réalisé.
Ici des notions — le plein/le vide, le fini/le non fini, la présence/l’absence  — s’affichent et ne demandent qu’à se transformer en propositions plastiques.
Ces oeuvres fonctionnent comme des «figures en creux», des réceptacles vides prêts à accueillir de multiples intentions.
Le rapport entre l’artiste et le spectateur est établi. Un dialogue peut se mettre en place. Lawrence Weiner a confiné ses oeuvres dans les angles et la salle semble ne pas être investie en totalité.  Cependant l’espace n’en est pas moins habité. La place est libre, et notre présence, notre réflexion, comble la parenthèse ouverte par l’artiste.

— 1/2 Begun 1/2 Finished whensoever, 2008. Language & the materials referred to.  Dimension variable
— Placed on display Briller par son absence where soever, 2008. Language & the materials referred to.  Dimension variable
— Vue de l’exposition, 2009
— Vue de l’exposition, 2009

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