LIVRES

L’Art contemporain au Burkina Faso

Étude d’un pays émergent sur la scène de l’art contemporain africain : analyse de cette évolution et présentation d’artistes marquants, à l’aune d’une esthétique plus largement ouverte, où critères d’appréciation et d’évaluation ne sont plus seulement occidentaux.

— Éditeur : L’Harmattan, Paris
— Collection : Les arts d’ailleurs
— Année : 2003
— Format : 13,50 x 21,50 cm
— Illustrations : quelques, en couleurs
— Pages : 176
— Langue : français
— ISBN : 2-7475-3215-1
— Prix : 18 €

Introduction
par Stéphane Eliard (extrait, p. 11-12)

L’art contemporain africain fait son apparition sur la scène mondiale depuis un peu plus d’une dizaine d’années. Il n’est plus exceptionnel que des artistes africains soient invités à participer aux grandes manifestations d’art contemporain et certains d’entre eux ont d’ores et déjà acquis une notoriété internationale. Mais ces quelques élus sont encore rares et la place de l’Afrique sur la scène de l’art contemporain mondial fait encore l’objet de débats où se cristallisent la complexité et l’ambiguité des rapports entre I’Afrique et l’Occident. Dans ce contexte, Ousmane Sow, Chéri Samba, Frédéric Bruly-Bouabré et quelques autres, sont les arbres qui cachent la forêt. En effet, dans leur grande majorité les artistes africains sont encore trop peu connus, y compris des professionnels de l’art. Même ceux qui ont acquis une certaine renommée restent plus ou moins en marge du monde de l’art. « Il est certain, selon Joëlle Busca, que les artistes africains émergeants bénéficient, par l’intermédiaire des biennales (Cuba, Dakar, Johannesburg, Sao Paulo, Sydney…) et de quelques institutions, en particulier la Maison des Cultures du Monde de Berlin, de réseaux qui les conduisent à une notoriété rapidement acquise, mais fragile car agissant dans un milieu relativement fermé, hermétique. Ils existent ; dans les revues comme NKA, Revue Noire ou Atlantica, mais pas dans les médias de l’art contemporain. » [Joëlle Busca, L’art contemporain Africain. Du colonialisme au postcolonialisme, Paris, L’Harmattan, 2000, p. 206] Lorsque dans une presse artistique plus généraliste, on trouve des articles sur tel ou tel artiste en particulier ou sur l’art contemporain en Afrique d’une façon plus générale, ces textes analysent moins les conditions de production des Å“uvres que leurs conditions de réception par I’Occident. Tout se passe comme si sur les Å“uvres elles-mêmes il y avait peu à dire. Il est vrai qu’elles ressemblent parfois peu aux objets qui sont familiers à la critique de l’art contemporain. [Cependant, les deux dernières biennales de Dakar témoignent d’un alignement des pratiques artistiques africaines sur un modèle international privilégiant les installations, les environnements, I’usage de la vidéo, de la photographie etc.] La tentation est forte, pour une certaine critique, d’éviter cette altérité en reléguant ces Å“uvres dans des catogories qui ne dépendent pas d’elle (artisanat, art brut, art d’aéroport). Mais cette relogation n’implique-t-elle pas l’aveu implicite que les discours critiques fondés sur la théorie esthétique occidentale sont incapables de rendre compte des Å“uvres contemporaines africaines ? Est-on en face d’objets que la pensée esthétique, autant dire la pensée philosophique occidentale, est incapable de saisir ? Malgré la réponse négative qu’on est tenté d’apporter à cette question, il faut cependant constater que jusqu’à récemment cette pensée esthétique s’est assez peu penchée sur les Å“uvres contemporaines africaines. Il découle de ce manque d’investigation une difficulté théorique à appréhender et à évaluer ces Å“uvres, laquelle implique leur rejet a priori. En opposition complète avec cette logique, certains auteurs se sont assigné une double mission : porter à notre connaissance l’existence de ces artistes et poser les jalons d’une réflexion esthétique à leur sujet. Un certain nombre de livres, dont ceux de Pierre Gaudibert, André Magnin, Jacques Soulillou, Jutta Ströter-Bender, Sidney Littlefield Kasfir, Joëlle Busca — la liste n’est pas exhaustive — défrichent pour l’esthétique un domaine encore peu exploité. C’est dans la voie ainsi ouverte que veut se situer le présent ouvrage. Mais, à la différence des textes de ces auteurs qui cherchent à englober l’ensemble du continent africain, celui-ci se concentre sur l’examen de la situation de l’art contemporain d’un seul pays : le Burkina Faso. Ce livre est le fruit d’une enquête réalisée à l’occasion de plusieurs voyages dans ce pays entre 1998 et 2001. Il se fonde sur des entretiens avec des artistes et des personnalités du milieu de l’art burkinabé, ainsi que sur l’observation de nombreuses Å“uvres.

(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions L’Harmattan)

L’auteur
Stéphane Eliard, après une formation en arts plastiques et la participation à diverses expositions collectives et associations d’artistes, fait des recherches en esthétique liées à l’art africain contemporain.