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Hans Bellmer. Anatomie du désir

Une présentation du processus même de l’œuvre du créateur de La Poupée est proposée. Un va-et-vient serré entre fabrique d’objet, reportage photographique et, travail central, le dessin. Le questionnement inédit des principes d’identité et de transgression n’est pas sans faire écho aux préoccupations contemporaines.

— Auteurs : Agnés de la Beaumelle, Paul Ardenne, Pierre Dourthe, Alain Sayag
— Éditeurs : éditions Gallimard/Centre Pompidou, Paris
— Année : 2006
— Format : 20 x 24 cm
— Illustrations : noir et blanc et couleur
— Pages : 264
— Langues : français
— ISBN : 2-07-011841-X
— Prix : 39,90 €

Présentation
Créateur, en 1934-1935, de La Poupée, cette créature «artificielle aux multiples possibilités anatomiques, capable de rephysiologiser les vertiges de la passion jusqu’à inventer des désirs», Hans Bellmer a poussé toujours plus loin son investigation d’une «anatomie de l’inconscient physique». Entreprise ambitieuse, impérieuse: depuis la «prise de vue» par l’appareil photographique — «mise en scène» objective de combinatoires les plus improbables —, jusqu’à l’expression graphique obsessionnelle, qui va du dessin miniaturiste le plus confidentiel à l’épure agrandie quasi abstraite, sa démarche peut être comprise comme la quête vertigineuse, sans fin, d’une forme, d’une image, d’une «existence infiniment vivante et mobile», par où donner corps au désir, et, ce faisant, d’en déceler et d’en activer les fantasmes inconscients.

D’une précision d’anatomiste et d’un raffinement d’érotomane, ses dessins, à l’audace transgressive, prennent la forme d’une graphie digne des maîtres de la Renaissance et du maniérisme allemand, sont ainsi autant de pages d’un «monstrueux dictionnaire» des pulsions secrètes, des «transferts des sens», des ambivalences du corps érotique. En grand ordonnateur de jouissances, Bellmer montre les harmonies et la cruelle beauté des rouages de la mécanique du désir.

Au-delà de son appartenance bien connue à la poétique et à l’imaginaire du surréalisme, auquel l’artiste (qui quitte définitivement Berlin pour Paris en 1938) a donné peut-être ses feuilles d’imagination amoureuse les plus outrées, il s’agit d’analyser aujourd’hui la singularité de cette œuvre violente, éminemment subversive dans le contexte des années 1920-1930. Incandescente et froide, comme celles de Sade et de Bataille, elle semble en réalité échapper à son temps. Son questionnement des principes d’identité et de transgression la rend particulièrement proche de notre sensibilité contemporaine.

(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions Gallimard/Centre Pompidou — Tous droits réservés)

English translation : Rose Marie Barrientos
Traducciòn española : Maï;té Diaz Gonzales