ART | CRITIQUE

Exotourisme

PMuriel Denet
@12 Jan 2008

Un monde mouvant de couleurs acidulées et musiques sirupeuses. Un espace pictural en fusion entre film de science-fiction et doux délire psychédélique.

Un long sas obscur débouche sur un balcon, qui plonge vertigineusement sur un panorama fantasmagorique. Un monde mouvant s’y déploie, de couleurs acidulées, et de musiques sirupeuses, qui happent le spectateur, témoin envoûté de métamorphoses insaisissables. Des engins non identifiés traversent cet espace pictural en fusion, qui évoque les prémisses d’un film de science-fiction, tout autant qu’un doux délire psychédélique.
Voilà le spectateur, rassuré par un sentiment de déjà-vu, en touriste intergalactique, dans un univers sens dessus-dessous, en rêveur éveillé, saisi dans un flottement sidéral, à la fois nostalgique d’un monde familier, celui peut-être des paradis perdus, ou artificiels, et cédant au vertige de son incessante dérobade.

Exotourisme a été produit dans le cadre de la deuxième édition du Prix Marcel Duchamp, dont Dominique Gonzalez-Foerster est la lauréate 2002.
Cette immersion totale dans un environnement artificiel d’images et de sons était déjà à l’œuvre dans Cosmodrome, créé au Consortium de Dijon en 2001. S’y profilait ce même devenir exotouristique de l’être au monde, qui semble au cœur des travaux récents de Dominique Gonzalez-Foerster.

On pouvait le vérifier, le 28 octobre dernier, lors d’une projection des trois films réalisés à ce jour par l’artiste. Tournés selon un dispositif similaire — exploration d’un lieu unique, et situé aux antipodes (Asie ou Brésil), utilisation de voix off en langues autochtones, doublées d’un sous-titrage en français qui inscrit le texte, et le sens, dans l’image même, et mouvements de caméra qui arpentent sans relâche la surface des choses, sans la transpercer —, ces films sont comme des traversées en biais du réel, de paradoxales brèches ouvertes sur l’invisible.
Entre le grand bond dans l’étrangeté, et la rassurante familiarité des apparences, une coupe, figurée par le plan oblique de l’écran d’Exotourisme, où le spectateur glisse, avec une volupté presque coupable, vers un ailleurs toujours déjà là.

Dominique Gonzalez-Foerster
— Exotourisme, 2002. Installation-environnement. Espace musical de Christophe Van Huffel, et production des images numériques par Delphine Zampetti et Lune verte.
Projections du 28 octobre 2002
— Riyo, France, 1999. Film couleur. 10 mn.
— Central, France, 2001. Film couleur. 10 mn.
— Plages, France, 2001. Film couleur. 15 mn.

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