ART | SPECTACLE

Du Futur faisons table rase

05 Déc - 06 Déc 2014
Vernissage le 05 Déc 2014

Résident de la Villa Médicis, le plasticien Théo Mercier prévient dans cette fresque délurée contre toute forme de nostalgie a priori. Dans ce spectacle total, qui mêle chant, danse, musique, comédie et arts plastiques, les temporalités s’inversent et la farce burlesque offre une réinterprétation des récits que l’on croit à tort inscrits dans le marbre.

Théo Mercier, Sexy Sushy, François Chaignaud, Pauline Jambet, Marlène Saldana, Jonathan Drillet
Du Futur faisons table rase

Ce soir l’avenir est à vendre. Pourtant quoi de plus imparfait que le présent? Le passé peut-être, avec ses oripeaux poussiéreux. Effets sonores et optiques, rythme heurté, jeux d’ombres et d’éclairages, apparitions, déclamation, tout se joue sur scènes. Le pluriel est important. Podium, tribune, tréteaux de théâtre, plateau de festival, piédestal: c’est là que le temps se matérialise, à la vitesse de la lumière. Il y a un sens de lecture, qu’il faut essayer de suivre. Chronologique absurde.
Puis: soudain, la musique occupe tout l’espace, noyant le public dans un déluge éclatant de sons. Ici et maintenant il assiste au spectacle d’un concert qui semble avoir déjà commencé. Pris dans l’éclair aveuglant de l’instant, déconnecté de tout autre réalité que celle de cette énergie ultra violente qui se donne à voir et à entendre. Les barrières Vauban sont-elles là pour protéger le groupe en train de jouer ou les spectateurs? Qui est vraiment en danger? C’est du live.

Où se réfugier sinon, dans l’éternité… Depuis qu’il est en résidence à Rome, à la Villa Médicis, Théo Mercier connaît l’angoisse de vivre entouré de vieilles pierres. Il la manifeste en peignant à la main des slogans de protestation sur d’immenses banderoles de coton. «Hier ne meurt jamais»; «Le bon vieux temps»; «Je ne regrette rien»…: ces banderoles servent de décor à cette tragique comédie musicale dans laquelle l’artiste a embarqué performeurs, acteurs, danseurs, chanteuse… tous ralliés à son impératif implacable: «Du futur faisons table rase». Ou pour le dire autrement, ne soyons pas nostalgiques de demain.

Se composant comme une frise historique farcesque, qu’on lirait de gauche à droite, Du Futur faisons table rase est un grand détournement de l’Histoire, qui n’hésite pas à jouer d’anachronismes, de calembours historiques, de sauts de puces dans le passé et de grands bonds dans le futur, pour être brutalement interrompu par la salve électronique d’un concert. Au cours de cette soirée, tout peut être vestige ou prémonition, relever du néoclassicisme ou de l’avant-garde, tant le grand bouillon que nous proposent Théo Mercier et ses invités recycle codes et genres avec malice. De podium en piédestal, le spectacle cite, parodie, assemble, dans des mixages irrévérencieux où le pastiche est peut-être plus sérieux que l’original. Iconoclaste variation autour de notre rapport au temps, la soirée entend faire table rase, peut-être pour réaffirmer avec humour notre ancrage dans le présent.

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