DANSE | SPECTACLE

Off Avignon | Ellipse

05 Juil - 23 Juil 2019

Pièce courte, Ellipse de Yan Raballand, déjoue la gravité. Dans une lumière bleutée, au son du violoncelle, la danse vacillante de Rémy Bénard transforme presque la roue Cyr en personnage singulier. Pour  un corps à corps où s'abolissent haut et bas.

Chorégraphie pour roue Cyr, la pièce Ellipse (2019) de Yan Raballand (Cie Contrepoint) oscille entre danse et cirque. La danse contemporaine pour ce qu’elle est foncièrement, et le cirque actuel pour son rapport à l’équilibre, à l’objet comme interprète à part entière. Solo dansé par Rémy Bénard, ce sont les lentes et graves notes du violoncelliste Guillaume Bongiraud qui enveloppent la pièce. Et toute en rondeurs vacillantes, Ellipse questionne le mouvement perpétuel. Quand la grande roue Cyr, sur son flanc, oscille dans un mouvement oblique aux allures hypnotiques, les publics restent suspendus. Comme lorsqu’une pièce, après avoir longtemps tournoyé, s’apprête à sceller le destin par pile ou face. Mais Rémy Bénard veille, et la roue tourne, encore et encore. Dans une infinité de combinaisons possibles. Outil, compagne, soutien, envol… Avec la roue Cyr, la figure tutélaire de L’Homme de Vitruve n’est jamais loin.

Ellipse de Yan Raballand : une chorégraphie pour roue Cyr, dansée par Rémy Bénard

Être humain imaginé par Leonardo da Vinci, L’Homme de Vitruve arbore des proportions idéales, inscrites dans un cercle. Mais à jamais figé sur son papier, L’Homme de Vitruve symbolise aussi une architecture encore très statique. Tandis qu’avec Ellipse, la structure s’anime. L’homme sort du cercle, y rentre, joue avec. Et le cercle, la roue, impose son rythme, sa cadence, s’émancipant parfois pour mieux affirmer sa singularité géométrique. Tandis que le symbole du cercle, comme délimitation de l’espace de jeu plus ou moins sérieux, ouvre la porte à quantité de rêveries. Portées par les harmoniques profondes du violoncelle. Dans une lumière bleutée, Ellipse se déploie ainsi en variations, façon blue jazz. Dessinant des rythmes circulaires et circulants, où la continuité prime. Comme le cercle, cette ligne sans début ni fin, la pièce s’empare du temps représentationnel pour mieux l’enrouler en volutes.

Un autre rapport à l’espace, où haut et bas s’abolissent en une danse rapide et légère

Jeu sur le temps en direct, Ellipse s’articule en moments propices. Ceux où le danseur peut s’élancer pour entrer dans le cercle et faire corps avec lui. Sans pour autant briser l’élan. Si l’on devient ce que l’on contemple, à la suite (un peu simplifiée) de Plotin, alors Ellipse entraîne ses publics sur la voie de la vibration. Là où le mouvement se nourrit de lui-même, se prolonge par une propulsion fuselée. Tandis que la roue Cyr permet à Rémy Bénard de changer complètement son rapport à l’espace, abolissant le haut, le bas, la droite, la gauche, pour ne garder que le centre de gravité. Corps inscrit dans un cercle mouvant, la danse s’y fait incroyablement rapide et légère. Avec d’infimes impulsions pour prolonger le tournoiement. Et jouant sur les frottements, les accélérations et les ralentis, les deux corps fusionnent ainsi dans une ivresse poétique.

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