ART | EXPO

Wim Delvoye

13 Mar - 12 Mai 2007
Vernissage le 10 Mar 2007

Depuis les années 90, Wim Delvoye transforme objets populaires en produits de luxe, créant des œuvres ambiguës à la fois cyniques et désespérément utopistes, à l’image de ses cochons tatoués.

Wim Delvoye 
Wim Delvoye

Delvoye a émergé au début des années 90. Il utilise des objets chers aux couches populaires et les transforme en produits de luxe. Comme beaucoup d’autres artistes des années 90, la stratégie qu’il utilise consiste à construire des versions amplifiées d’objets familiers, fabriqués dans des matériaux rares et dans un esprit d’ironie. Mais alors que chez d’autres cette dialectique est devenue prévisible, Delvoye se sert d’elle pour élaborer une gamme de produits recélant les oeuvres d’art les plus moralement ambiguës de notre époque.

Delvoye est unique par sa capacité à produire des œuvres à la fois résolument cyniques et désespérément utopiste. Ses cochons tatoués sont l’expression la plus avancée de son ambiguïté. Ce projet a débuté en Belgique dans les années 90. Puis, profitant des régulations économiques plus souples des pays émergents, Delvoye l’a délocalisé, selon les règles de la mondialisation, et a ouvert un élevage de cochons dans la banlieue de Pékin. Une fois par semaine, son cheptel de vingt bêtes, après avoir absorbé un léger sédatif, est tatoué de motifs divers dus à l’imagination de Walt Disney ou d’autres inspirations populaires.

À première vue, ces œuvres, comme tant d’autres des années 90, ressemblent à une plaisanterie dadaïste sur les dernières heures de l’art contemporain: le cochon en tant qu’œuvre d’art, le tatouage en tant que nouvelle peinture, l’élevage en tant que mimesis du marché d’art capitaliste. Mais ils sont aussi, à l’instar d’autres créations de Wim, un symbole médiéval de la vanité humaine. La mode de la décoration corporelle, si répandue chez les jeunes consommateurs occidentaux, de même que la puissance physique, la séduction sexuelle et le caractère branché qu’elle implique, sont tournés en ridicule par leur transfert sur la peau d’un humble animal. Pourtant, les cochons tatoués sont aussi un projet d’un idéalisme pervers. Ils ont échappé aux fabriques alimentaires chinoises. La pauvre ferme chinoise a été promue au rang de studio d’artiste. Et ses ouvriers sont devenus les assistants d’un créateur. La ferme de Delvoye, pourrait-on dire, est un prototype pour un Monde Meilleur.

Dans ce sens, Delvoye a parodié ce que les théoriciens français et les conservateurs allemands appellent les «structures parallèles», où l’artiste utilise sa position privilégiée, libéré des contraintes du consumérisme et du marketing, pour créer des prototypes et améliorer le monde. D’où ses cochons traités en oeuvres d’art plutôt qu’en saucisses. Des décorations gothiques taillées au laser sur ses camions de construction aux saints figurants sur ses vitraux, la religion est un thème récurrent chez Delvoye. En signe d’appropriation, la signature de Delvoye puise à différentes sources: le logo de Walt Disney, les structures parallèles, l’utopie, l’anti-art dada, le médiévisme (le style gothique, les vanités, le vitrail, la scatologie).

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