ART | EXPO

Vue d’exposition

25 Jan - 09 Mar 2013
Vernissage le 24 Jan 2013

La technique du trompe l’œil provoque l’illusion de la présence d’objets réels, par une palette d’effets de perspective et de jeux de texture. Si Morgane Fourey use de ces artifices, son travail se définit davantage comme une peinture en volume, articulant la sculpture et l’espace de représentation défini par la peinture.

Morgane Fourey
Vue d’exposition

Morgane Fourey présente une exposition de prime abord sans œuvre. Profilés en mousse bleue, adossés contre un mur, caisses de transport en bois ouvertes, cartons remplis de particules de calage. Autant d’indices et de témoins du passage d’œuvres qui évoquent un montage d’exposition: un moment entre-deux dans la vie des œuvres, un passage, une transition.

Dans la plus grande économie de la vision, les œuvres révèlent peu à peu leur présence. Après un examen minutieux, leur caractère illusionniste surgit: la mousse s’est faite bois, le polystyrène marbre. L’ambiguïté du matériau est renforcée par l’usage même des objets représentés et crée une confusion par les contradictions entre le rigide et le mou, le fragile et le solide, le précieux et le trivial. Puisant son vocabulaire dans les champs du faux-semblant et du trompe l’œil, la pratique de Morgane Fourey conjugue la tradition d’imitation de la peinture classique et la réappropriaton des techniques liées à l’artisanat, notamment celles des peintres en décor.

Ici, la touche du peintre apparaît comme une empreinte invisible. Si le trait est précis, le travail minutieux, Morgane Fourey restitue la matière de chaque objet tout en lui refusant la fonction qu’il recouvre habituellement. Jouant sur l’organe de la vision et de la perception, la facture de l’œuvre cherche à imiter avec un matériau différent la matière de ce qui est reproduit ou présenté. Par l’artifice d’une nouvelle matière picturale, un effet de vérisimilitude de l’objet représenté est créé, alors même que la surface peinte contredit la matière de l’objet. Fixant les objets à la fois par l’acte de la peinture et par leur mise en scène dans un espace, Morgane Fourey arrête l’image sur la photographie d’un moment: celui du montage, de la construction, engageant une activité invisible. Par là même, elle introduit une certaine dramaturgie en transformant l’espace d’exposition en véritable scène de théâtre, vidée de ses acteurs.

Malgré leur absence de la scène, c’est bien sur le travail de ceux qui agissent et fabriquent en amont — les artisans, les restaurateurs, les régisseurs — que l’artiste porte son regard. Par là même, elle rend hommage au travail discret et caché des métiers de l’ombre, celui des garants de l’exposition.

Loraine Baud

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