ART | EXPO

Vie privée et familiale

19 Avr - 12 Mai 2012
Vernissage le 19 Avr 2012

A travers différents médiums, la question des frontières est au centre du travail de Badr El Hammami. Pour l’artiste, les «frontières» s’expriment à travers des espaces, des images comme à travers des mots et des objets mais aussi comme des paradoxes tels que séparation et point de jonction, fascination et peur, certitudes et doutes.

Badr El Hammami
Vie privée et familiale

«Vie privée et familiale» est une mention qui renvoie à la délivrance de cartes de séjour aux étrangers séjournant en France. C’est ce qu’ils appellent le «motif de séjour». «Vie privée et familiale» est le titre de l’exposition de Badr El Hammami imaginée pour l’espace29. L’artiste expérimente de façon poétique le concept de frontière autour d’un ensemble d’installations, textes, vidéo et performances. Il questionne cette notion arbitraire sans laquelle l’étranger ne serait pas. Son statut d’étranger en France lui permet une lecture paradoxale des cartes et des territoires. Car lorsque Badr regarde une carte, il ne voit pas «des pays juxtaposés, ni des formes», mais «un réseau de lignes, une forme rhizomique qui connecte tous les territoires». Après tout, ne sommes-nous pas tous confrontés régulièrement à une redéfinition de nos propres limites et territoires?

L’artiste s’approprie ici à son tour «ce que ces lignes produisent, induisent, impliquent» en explorant la polysémie métaphorique de la frontière. A travers un jeu d’ombres et de bougies, une ville prend feu. La frontière prend alors le sens d’opposition et de conflit. Le regard critique de l’artiste est la lunette d’une génération devenue insensible aux événements tragiques relatés perpétuellement par les médias. «Les spectateurs sont ici à la fois consommateurs de cette image de guerre et acteurs de sa commémoration.» Ce dialogue constant entre histoire personnelle — ses souvenirs des premières images télévisées de guerre — et Histoire, se lit en filigrane dans chacune de ses Å“uvres.

L’artiste appâte notre soif d’indiscrétion par l’écoute d’une correspondance privée (Thabrate) reproduite dans les conditions de communications similaires à celles dont disposaient la génération de migrants du Maghreb des années 80. Ces lettres magnétiques s’expriment en hommage à une génération qui se jouait des frontières et de l’éloignement. Badr défie la rapidité de la société des médias et des communications pour un retour au sources; la tradition orale. «Vie privée et familiale» aurait pu être une invitation à l’exil, comme semble l’indiquer la citation de Mahmoud Darwich introduisant le dossier de l’artiste: «l’exil ne finit jamais, qu’on soit loin de sa patrie ou qu’on y vive.». Au contraire, en interrogeant les séparations et les jonctions, la fascination et la peur, l’obsolète et le moderne, la similitude et l’altérité, Badr El Hammami présente à l’espace29 une exposition qui rompt les frontières. Badr El Hammami regarde et nous fait regarder ailleurs par l’art. «Aller vivre ailleurs, c’est transgresser.»

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