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Vera Röhm : Ergänzungen

Des piliers aux extrémités rongées dont chaque partie manquante est restituée par son équivalent de plexiglas composent cette série d’immenses sculptures de bois. Les modules géométriques ainsi créés posent les idées d’unité et d’inachèvement de l’œuvre.

— Éditeur(s) : Topographie de l’art, Paris
— Année : 2002
— Format : 23,50 x 16,50 cm
— Illustrations : nombreuses, en couleurs et en noir et blanc
— Page(s) : 56
— Langue(s) : français
— ISBN : non précisé
— Prix : non précisé

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Ergänzungen
par Adon Peres

Après avoir réalisé une série d’œuvres associant le métal et la pierre au plexiglas, Vera Röhm entame vers le milieu des années 1970 son cycle de sculptures intitulé Ergänzungen. Dans ce travail, le bois s’impose comme le matériau de prédilection. Les Ergänzungen sont constitués à partir des piliers de bois cassés sur lesquels viennent s’ajouter des moulages en plexiglas épousant la forme de l’élément naturel. Dans certaines pièces, divers modules en bois sont réunis par ce matériau plastique forme des angles donnant ainsi origine à des formes géométriques.

Les Ergänzungen frappent tout d’abord par le sentiment de dualité qui s’en dégage. L’idée de la coexistence de deux éléments de nature différente, l’acte de déconstruction et de construction, la vérification du simple et du complexe sont des notions qui s’installent immédiatement. Ces sculptures se placent volontiers sur le terrain des « frontières ». Et cela même dans l’espace parcouru par l’art vers le milieu du XXe siècle. Elles évoquent à la fois le caractère impersonnel et industriel d’un art que l’on nomme habituellement minimal, tout en revendiquant l’expression d’un acte. De la même façon, les formes géométriques et concrètes extrapolent le questionnement pur de la plasticité pour faire place à celui plus universel du rôle de l’individu.

C’est dans ce contexte que le cycle des Ergänzungen s’enrichit en 1989 lorsque ces scuIptures font partie du ballet lm (Goldenen) Schnitt I du chorégraphe Gerhard Bohner. En s’inspirant de Préludes et fugues 1-12 du clavier bien tempéré de J.-S. Bach, le chorégraphe cherche la tension entre les possibilités géométriques du corps et de la nature humaine. Le titre de ce ballet fait référence à l’idée de section dorée, ou nombre d’or, qui relève de la science des proportions. Les rapports entretenus entre l’homme et la science constituent d’ailleurs un autre trait caractéristique de l’œuvre de Vera Röhm.

Le choix du nom Ergänzungen pour se référer à ce cycle de sculptures est assez significatif. Bien que ce terme provienne du verbe ergänzen qui en allemand veut dire compléter, dans la pensée développée par l’artiste, la notion d’achèvement ou de fini reste en suspens. II ne serait pas possible non plus de les considérer comme des suppléments car il n’est pas question dans sa démarche de remplacer toute chose par une autre. En effet, dans la langue française, le terme qui se rapprocherait le plus du concept de son travail est celui d’intégration, où les sens d’insertion et de fusion sont compris, avec toutes les implications que peut susciter un tel acte.

(Texte publié avec l’aimable autorisation d’Adon Peres)