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Velvet

PSmaranda Olcèse-Trifan
@20 Mar 2009

Dans le cadre de la Biennale nationale de danse en Val-de-Marne, l’Atelier de Paris accueillait le solo Equally Loud, extrait de Surface, une pièce de 2008, ainsi que The End (création 2009) qui est une commande de la Biennale et le premier volet d’un triptyque.

Dès les premiers pas de Equally Loud, extrait de Surface, série de trois soli pour quatre femmes dont la violoniste Hae Sun Kang, nous sommes sous le charme d’une juste proportion entre la virtuosité du mouvement et sa nuance un brin ludique. Il y va d’une danse abstraite, légère et complexe à la fois. Le texte, qui en constitue la bande son, se dresse en pure matière sonore, dépourvue de tout élément narratif. La juxtaposition de la danse et du texte lu nous place dans un présent de la perception visuelle et sonore, que l’apparition insolite d’une femme aux apparences de pin-up vient déchirer, de manière ludiquement inquiétante.

The End reprend les mêmes principes et les mène vers une maîtrise absolue. Dans cette création, le texte de John Cage, Lecture on Nothing, auquel Eve Couturier prête sa voix, y est pour beaucoup. Joanne Leighton avoue trouver « extrêmement libérateur de travailler l’univers de John Cage » — sa dynamique d’invention et de renouvellement, le désaveu des conventions, la remise en question de la forme elle-même sont les prémisses d’un travail de recherche enthousiasmant. Car dans ses pièces, la chorégraphe, avide d’expérimentations, joue des concepts, des processus de création et des interrogations intellectuelles glanés dans d’autres formes d’expression artistique : la littérature, la musique, le cinéma ou l’architecture.

Outre le fait que le texte apporte une libération du mouvement dans l’espace scénique, Lecture on Nothing, dans sa structure intime, accompagne de manière organique la danse, accomplissant un des vœux les plus chers à la chorégraphe, la réflexivité, la volonté de commenter le spectacle au moment même de sa représentation, la danse qui nous est donnée à voir portant de cette manière en elle même les conditions de sa fabrication.

Cette pièce, qui décline la notion de fin — que ce soit « les dernières notes d’un morceau de musique, le dernier mouvement dansé, la fin d’une histoire, la sortie du plateau, la fin de la pièce, la perte de la conscience, la fin d’un état ou le passage d’un état à un autre » — utilise un procédé apparenté au montage cinématographique. La chorégraphie est rythmée par la ritournelle — composition, défaite, mais surtout superposition — de tableaux vivants mettant en jeu des images fortes, aux accents fantasmagoriques, telle la maternité pieuse, la reine et le roi, l’esprit du printemps tout juste descendu d’une toile réalisée pour le spectacle par les élèves de l’école du Théâtre national de Strasbourg. L’espace de la scène devient ainsi un espace de flottement dont la contiguïté est assurée par une danse à la fois complexe, sophistiquée et très charnelle.
 

— Equally Loud, extrait de Surface (création 2008 – 20 minutes)
— The End (création 2009 – 25 minutes)

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