ART | EXPO

Trois fois rien

14 Sep - 24 Nov 2013
Vernissage le 13 Sep 2013

Cette exposition rassemble des artistes dont les œuvres fonctionnent sur une économie du peu, comme si le moins permettait le plus, tant au niveau des perceptions et des images que des associations qu’ils peuvent provoquer chez le spectateur nous proposant une poétique de la discrétion et de la modestie.

Burkard Blümlein, François Bouillon, George Brecht, Marie-Claude Bugeaud, Pierre Buraglio, Damien Cabanes, Jean-Loup Cornilleau, Patrick Dekeyser, Daniel Dezeuze, Noël Dolla, Stan Douglas, Roberto Horacio Elia, Isabelle Ferreira, Robert Filliou, Pierre-Yves Freund, Fabienne Gaston-Dreyfus, Patricio Gil Flood, Jean-François Guillon, Jean Laube, Lucrecia Lionti, Colombe Marcasiano, Antoinette Ohannessian, Pol Pierart, Niele Toroni, Anu Tuominen, Richard Tuttle
Trois fois rien

Cette poétique de la discrétion et de la modestie a néanmoins les ambitions les plus grandes: celles de nous faire éprouver des expériences essentielles, dans un silence, une respiration ou l’espace d’un instant. S’y ajoutent un humour et une ironie qui sont l’affirmation d’une légèreté recherchée contre la pesanteur des choses; mais sans oublier que l’humour peut aussi être la politesse du désespoir.

Beaucoup de ces artistes viennent d’horizons qui voient se croiser art minimal ou art conceptuel, des mouvements comme Fluxus, les néo-dadaïstes, support-surface ou encore BMPT sans oublier d’évoquer les ready-made de Marcel Duchamp. On doit aussi rappeler les Incohérents avec Combat de Nègres dans une cave pendant la nuit de Paul Bilhaud ou Première communion de jeunes filles chlorotiques par un temps de neige d’Alphonse Allais qui ont amené une radicalité à l’acte artistique en l’inscrivant d’emblée dans une part calambourgesque de leurs œuvres.

On peut citer l’art de la flânerie et de la collecte cher aux surréalistes; les assemblages d’objets dadaïstes ou plus proche encore 4’33“ de John Cage (1952) dans lequel le silence de l’instrument est associé aux bruits du lieu et des participants (interprète et auditeurs) pour faire œuvre.

Parmi les artistes de référence présentés dans cette exposition on trouvera George Brecht ou Robert Filliou, qui avec La Joconde est dans l’escalier revendique cet en deçà de l’œuvre qui nous semble récurrent dans l’exposition et qui fonctionne à la fois comme ironie sur la notion même d’œuvre et comme un impulse visuel. De même, notre choix s’est porté sur un travail de Niele Toroni qui s’en est tenu au même principe de ne produire sous des modalités et des supports multiples que des variantes d’empreintes de pinceau N° 50.

Nous avons associé deux artistes issus du Mouvement Support-Surface: Noël Dolla et Daniel Dezeuze qui matérialisent au plus juste ce souhait de simplifier la production picturale, d’en déconstruire les moments pour aller à leurs constituants premiers, et ce dans le souci d’ouvrir au possible sans être parasité par le trop plein.

Il faut y ajouter Pierre Buraglio dont les Bleus nous font aller de Giotto à Hantaï ou encore Stan Douglas, figure majeure de l‘art vidéo. Nous y avons associés des artistes singuliers comme François Bouillon qui travaille toujours avec une économie de moyens extrême et met en forme des fictions très épurées et de petits rituels symboliques, Pol Pierart et ses mots doubles peints, Roberto Elia avec son affection pour l’infra mince, Marie-Claude Bugeaud pour ses petit riens peints qui font images et peintures ou encore Jean-Loup Cornilleau pour ses objets et images fragiles fais de chutes et de bouts de ficelles du réel.

Quant aux générations plus jeunes présentes ici, elles en sont les héritières mais sans dogmatisme. Certains viennent de l’abstract comme Damien Cabanes (pour les œuvres choisies), Fabienne Gaston -Dreyfus, Colombe Marcasiano, Isabelle Ferreira ou Jean Laube. D’autres sont un rapport avec l’usage du mot et du récit ou du temps. Mais aussi de l’objet. La référence à l’art conceptuel, au minimalisme, à Fluxus ou au néo-dadaïsme est perceptible chez Patrick Dekeyser, Patricio Gil Flood, Jean-François Guillon ou Lucrecia Lionti, Antoinette Ohannessian, Anu Tuominen et Pierre-Yves Freund.

Ce sont ces croisements de genres qui charpentent l’exposition. On y découvre une appétence à condenser du réel, du sensible, du vécu et de la pensée dans un usage subtil d’objets ou matériaux au rebut. C’est l’univers de la condensation, de l’ellipse, du reste, du fragment et de l’infime mouvement du monde qui nourrit ces œuvres la fragile présence fait toute la richesse: une façon de redonner ses lettres de noblesse au banal et au presque rien.

L’expérience sensible qu’elles cristallisent témoigne d’un art d’aménager les restes, qui se marie avec un refus de l’esprit de sérieux. Et qui nous rappelle que parfois c’est dans la partie qu’on pressent le tout; et que le moins est souvent mieux que le plus.

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