ART | EXPO

Transcom Primitive

22 Oct - 16 Jan 2016
Vernissage le 22 Oct 2015

Pierre Clément propose un voyage extatique dans de nouveaux champs de conscience et explore les potentialités formelles et la puissance symbolique des images et des objets usinés. Mélange savant de matériaux bruts et d’objets consommables, chaque œuvre est une composition révélant le potentiel sculptural d’une image.

Pierre Clément
Transcom Primitive

La pratique de Pierre Clément s’articule autour de formes esthétiques, culturelles et politiques qui ont émergé avec Internet. Dans cette exposition, Pierre Clément propose un voyage extatique dans de nouveaux champs de conscience mettant à l’épreuve les visions du monde plus «inavouées» et «souterraines» telles que le chamanisme, l’ésotérisme et les contre-cultures.

Convoquant une mystique teintée de savoirs empiriques, le titre de l’exposition télescope les enjeux inhérents aux domaines de la communication et des technologies avec celui des sciences humaines et occultes. A la fois codage, récepteur et émetteur, «Transcom primitive» puise ses origines dans le chaos et l’avènement des nouvelles technologies.

Mélange savant de matériaux bruts et d’objets consommables, chaque œuvre est une composition révélant le potentiel sculptural d’une image. A la fois, «psychédélique», «hackée», «pimpée», cet assemblage d’objets, de matériaux et de récits rappelle le Codex Seraphinianus de Luigi Serafini, livre de «l’âge de l’information», époque à laquelle le codage et le décodage de messages deviennent de plus en plus important en génétique et en informatique.

Trouvant de l’ordre dans ce qui semble chaotique ou dépourvu de sens, ces œuvres transforment l’idée même du visible en réinventant un équilibre du monde. Il est ici question de paysage, de mémoire, et de propagation: s’agit-il de la fabrication d’un nouveau monde?

Cette appropriation constante d’objets, achetés pour la majorité en ligne sous forme de kit puis remontés, façonne ce goût de la combinaison. Entre «bricologie» et mythologies inhérentes au progrès ou aux systèmes techno-industriels, Pierre Clément explore ici les potentialités formelles et la puissance symbolique des images et des objets usinés: imprimante 3D, accumulation et répétition d’antennes satellites, symbole d’une certaine télécommunication; réappropriation des fonds d’écran, images iconiques de l’univers technologique et de la fabrique de ses origines.

Aussi, par un télescopage subtil avec les origines de la musique techno, il affirme les racines de sa pratique avec le sampling. A la recherche de «forces» naturelles, surnaturelles, divines et humaines, il «recharge» ses œuvres d’une capacité magique et crée des leurres en falsifiant les matières, en se réappropriant des techniques à la fois de pointe et manuelle.

Cet appel aux puissances souterraines et clandestines fait dérailler et dériver la fonction des objets. De la pratique à la tactique, le savoir se combine au faire au sein de ces multiples dichotomies entre technologie et archaïsme. Chaque matériau est ici utilisé pour ses propriétés physiques et symboliques et ne cesse d’être alimenté d’une tension en continu.

Considérant les mutations de la conscience humaine, Pierre Clément explore les dimensions alternatives de la pensée et se réfère à Timothy Leary, psychologue visionnaire rattaché à Harvard, penseur des contre-cultures des années 60 et icône du new edge cyberpunk, qui examina les accélérations du cerveau et de son pouvoir via les technologies, les drogues et les mouvements culturels (hippie, beatnicks, cyberpunk,…).

De Timothy Leary (Chaos and Cyberculture) à Jeremy Narby (Le serpent cosmique, l’ADN et les origines du savoir) ou Greil Marcus (Lipstick Traces: Une histoire secrète du XXème siècle), on peut également y entrevoir une référence à John Zerzan, auteur américain, philosophe du primitivisme néo-luddiste et du terroriste Ted Kaczynski surnommé Unabomber. John Zerzan appela à un retour au primitivisme, c’est-à-dire à une reconstruction radicale de la société basée sur un rejet de l’aliénation et sur l’idéal de l’état sauvage. Entre technologie et idéologie, le monde intérieur se télescope avec le monde extérieur.

Cette exposition s’inscrit dans le cadre d’une recherche qui interroge «l’usage des forces: visions magiques, alchimiques, occultes dans l’art contemporain et les cultures visuelles» (soutien à la théorie et à la critique obtenu en 2014 – Cnap). Au croisement de l’art, de la sociologie et de la culture populaire, cette analyse critique des pratiques occultes et de la réinvention de modes de vie s’est principalement orientée vers les contre-cultures en Europe ou aux Etats Unis. La force d’anticipation de l’art est constamment mise à l’épreuve.

Marianne Derrien

Vernissage
Jeudi 22 octobre 2015 à 18h

critique

Transcom Primitive

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