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Toxic

Auteur phare de la bande dessinée américaine contemporaine, Charles Burns revient avec un album déroutant qui oscille sans cesse entre rêve et réalité, truffé de références à l’univers d’Hergé.

Information

Présentation
Charles Burns
Toxic

L’histoire démarre par une case noire. Puis, dans la suivante, un trait bleu dessine une forme qui pourrait être celle de la houppe de Tintin. Le lecteur découvre ensuite un personnage qui se réveille sans savoir où il se trouve.

Rêve ou cauchemar, nul ne saurait dire de quoi il retourne exactement. Le personnage se lève et aperçoit son chat –pourtant mort depuis longtemps déjà –en arrêt devant un trou béant pratiqué dans un mur de briques, au fond de la pièce.

Il se laisse guider par sa curiosité et décide de passer de l’autre côté, où l’attend un univers étrange entre décombres, inondations, créatures sorties de nulle part et champignons tachetés qui ressemblent à celui de l’album de Tintin, L’Etoile mystérieuse. Bientôt, il prendra pied dans une sorte de décor parallèle dans lequel un nain lui servira de guide. Le lecteur, lui, vient de pénétrer dans le monde déconcertant de Charles Burns…

Toxic est le premier livre en couleurs de Burns, qui nous avait jusqu’alors habitués à un dessin en noir et blanc qui faisait ressortir la précision de son trait et la finesse de ses hachures, instaurant un contraste entre la douceur de son expression graphique et la morbidité fascinante de ses bandes dessinées.

La sensation d’étrangeté n’en est pas moins présente pour autant, et Burns nous entraîne dans un récit décroché du temps et de la réalité où l’on suit un personnage nommé Doug, jeune adulte épris de performances artistiques qui rencontre une jeune fille en butte aux tracasseries de son copain plutôt violent. On ne sait jamais où l’on se trouve, on ne sait jamais si le réel prend le pas sur le fantasme, et c’est tout ce qui fait le charme de cet album envoûtant qui réclame une lecture attentive et renouvelée.

L’amateur d’Hergé s’amusera à relever les nombreuses correspondances avec l’univers de Tintin, l’une des grandes références de Burns qui se réclame aussi du travail de l’écrivain William Burroughs.

Nourri par la lecture du magazine Mad et les films de Roger Corman, Burns construit une œuvre d’une profonde originalité dont les multiples relectures n’épuisent pas la richesse des thèmes et qui offre une multiplicité de pistes au lecteur, lequel prend un malin plaisir à se laisser emporter au gré d’un imaginaire aussi riche que fascinant.