ART | EXPO

Tout s’écoule, rien ne reste tel

13 Jan - 31 Mar 2012
Vernissage le 13 Jan 2012

L’exposition Tout s’écoule, rien ne reste tel fait entrer en résonance un ensemble d’œuvres de la collection du Frac des Pays de la Loire qui se déploient dans différents espaces sous la forme d’un parcours.

Jean-Michel Alberola, Francis Alÿs, Roy Arden, Richard Baquié, Ulla von Brandenburg, Gerard Byrne, Mircea Cantor, Arnaud Claass, Marie Denis, Valie Export, Isabel Formosa, Hamish Fulton, Toni Grand, William Hunt, Karen Knorr, Jean-François Lecourt, Urs Lüthi, David Medalla, Adrian Paci, Yan Pei-Ming, Giuseppe Penone, Eric Poitevin, Bruno Serralongue
Tout s’écoule, rien ne reste tel

L’accélération de nos vies modernes apparue au XXe siècle a bouleversé la relation que les hommes entretiennent avec le temps. Poser la question de la mesure du temps aujourd’hui se révèle donc riche d’interrogations sur l’homme et la nature, la vie et la mort, la mémoire, le présent et notre devenir. Abordée au travers d’oeuvres des années 1970 à nos jours, telle une «Machine à explorer le temps», l’exposition se présente comme une invitation à réinvestir le présent.

«Que chacun examine ses pensées, il les trouvera toutes occupées au passé et à l’avenir. Nous ne pensons presque point au présent; et si nous y pensons ce n’est que pour en prendre la lumière pour disposer de l’avenir. Ainsi nous ne vivons jamais mais nous espérons de vivre; et, nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais. » Pascal, Pensées.

La Vanité ou nos vies éphémères

Au XVIIe siècle, un nouveau genre de peintures appelé «Vanité» s’épanouit et rencontre un grand succès dans les pays catholiques. Ce genre illustre de façon symbolique le thème philosophique de l’inéluctabilité de la mort, de la fragilité des biens terrestres et de la futilité des plaisirs. « La vanité dit d’abord la métamorphose, l’instabilité des formes du monde, des articulations de l’être, la perte d’identité et d’unité, qui le livre au changement incessant; elle dit le monde en état de chancellement, la réalité en état d’inconstance et de fuite.» Louis Marin, Les traversées de la Vanité.

Ce thème qui met en lumière l’effet du temps sur les êtres, connaît depuis le milieu du XXe siècle un véritable renouveau. Pour représenter le temps qui passe, le vieillissement est un artifice dont se servent les peintres classiques comme les artistes contemporains. Urs Lüthi artiste suisse se met en scène depuis les années 1970 dans des séries de photographies dans lesquelles il change d’apparence.

Tour à tour jeune ou vieux, homme ou femme, élégant ou vulgaire, il pose face à l’objectif de manière théâtrale, tel un sujet malléable et transformable. Le diptyque photographique intitulé Just another story about leaving, appartient à une série au travers de laquelle l’artiste aborde la question de l’empreinte inéluctable du temps sur les êtres. Dans la partie gauche, l’artiste apparaît vieilli, l’air sérieux, grave, sombre, fixant l’objectif pour ainsi établir avec le spectateur un face à face troublant, qui ne laisse pas indifférent. Dans la partie droite figure un détail d’un intérieur banal, faisant de la vieillesse et de la mort un sujet commun, auquel les humains sont inévitablement condamnés.

L’autoportrait de Jean-François Lecourt, Tir dans l’appareil photographique, représente une mise à mort de l’image de l’artiste. Rapprochant le procédé de fixation du temps qu’incarne la photographie, avec celle de fixer définitivement l’état d’un être par la mise à mort, l’artiste tire à balle réelle sur l’objectif. Vieillissement, mise à mort, ou mise en danger, les artistes se mettent en scène dans des œuvres placées sous le signe des «Memento Mori » — locution latine qui signifie «souviens-toi que tu mourras».

Ainsi l’installation de l’artiste anglais William Hunt, Forgot Myself Looking at you (je me suis oublié en vous regardant), est composée du décor et du film résultant d’une performance réalisée par l’artiste en 2009. Disposé devant une tribune entouré de miroirs, William Hunt a peu à peu recouvert son visage de plâtre ne respirant plus que grâce à un harmonica. Avant de manquer définitivement de souffle, l’artiste a retiré ce masque, comme un geste ultime de survie. Le temps de la performance a été déterminé par la résistance de l’artiste, jusqu’à l’épuisement de ses forces. (…)
Vanina Andréani

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