DANSE

Tilt

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@11 Déc 2012

Rob de Oude nous entraîne dans une vertigineuse plongée au cœur d’un Op Art revu et rajeuni à l’apogée du numérique. Prenant l’apparence de sympathiques carrés de tissus imprimés, ses peintures et dessins sont autant de pièges s’emparant du spectateur pour le promener dans l’espace d’exposition. «Tilt» est une sortie de soi au rythme d’un facétieux dynamisme.

Si l’on croyait les tressages d’osier réservés aux grabataires sacs des marchés dominicaux, Rob de Oude, au sein de l’exposition «Tilt», en propose une version toute autre avec le collage qu’il déploie sur l’une des parois de la galerie Gourvennec-Ogor: réalisée à partir de papier adhésif vert lime (tendance fluorescente), la fresque composée de quatre bandes —faites d’un maillage de fines lignes obliques— affiche un ostentatoire cinétisme sitôt que le spectateur a osé le premier pas en leur direction. Son regard une fois crocheté à l’un des sillons de la verte fréquence, il s’en trouve amené à découvrir les onze dessins dont elle rythme frénétiquement l’agencement linéaire.

Contenues dans des cadres-boîtes, ces œuvres de petite dimension (20,5 x 20,5 cm) se composent d’un enchevêtrement terriblement ordonné de lignes polychromes, dont les recoupements créent de rigides formes géométriques, jacquard hypnotique. Ces polygones sont infléchis cependant par des vibrations semblables à des empreintes digitales, conservant leur anonymat dans le trouble dont elles émanent.
Crayon de couleur sur papier à dessin blanc: une technique simple et presque infantile qui, manipulée avec dextérité par l’artiste, interpelle directement la fascination juvénile du spectateur (à laquelle se prête tout un chacun face à un autostéréogramme et son fonctionnement mystérieux).

Parmi ces dessins, s’immiscent deux peintures à l’huile sur panneaux de bois carrés, dont les quatorze complices —de 41 x 41 cm chacune— sont disposées sur les autres murs. Recouvrant un fond préparé à l’aérographe, des réseaux complexes de lignes colorées tracées minutieusement au pinceau s’y agencent pour en creuser la surface, créant un effet analogue à celui des dessins.
Aucun à-plat franc et froid ne demeure dans ces peintures de Rob de Oude, ce qui écarte son travail de l’impersonnalité d’un Vasarely, qu’il rencontre par ailleurs là où le spectateur perd pied. En effet, sur les tranches des panneaux, demeurées brutes, quelques bribes de lignes et postillons d’aérosols sont le leurre dont croit pouvoir se saisir le spectateur pour entreprendre un démantèlement méthodique du processus de réalisation, tentative vaine qui l’entraîne à effectuer un déplacement malaisé à la fois autour et dans l’espace virtuel de l’œuvre.

Un jeu rythmique est également provoqué par la disposition de ces carrés, relayant ainsi la fresque, tantôt présentés en ligne sur le mur d’en face —où certains d’entre eux opèrent une rotation sur eux même (pied de nez à une monotonie qui sans cela les aurait menacés); tantôt par groupes de trois ou quatre— en un agencement tel que les lignes se prolongent de l’un à l’autre, bravant l’espace qui les sépare.

Participant de cette désorganisation du cheminement au sein de l’espace d’exposition, quatre des dessins sont présentés sur chacune des faces du pilier central de la galerie, enroulant autour de cet axe les pas du spectateur qui, dans sa déambulation, ne peut manquer de porter l’œil sur les trois toiles à l’huile et à l’acrylique présentées aux murs adjacents à celui de la fresque.

Rencontre. L’effet créé par les panneaux de bois est cette fois propulsé à l’échelle du spectateur de par la taille des toiles (137 x 137 cm). Les grilles deviennent grillages, et happent le spectateur qui, pendant le face à face, devient à la fois captif et voyageur dans un espace acide, où les interstices se dilatent, où les lignes grésillent. De nouveau, la tentation de lever le voile sur la composition des réseaux inextricables est grande, mais proportionnelle au danger que cela engendre: faire l’objet, c’est bien là le risque contenu dans les travaux écraniques de Rob de Oude.
Concentrant son acuité visuelle pour venir à bout de ces tissages picturaux, le spectateur s’en trouve comme piégé, dans un élan vers la profondeur qui semble s’y créer mais le ramène sans cesse à la surface plane du support. Mais ceci ne serait qu’un tour de manche visuel si ce dernier ne faisait pas, en plus, l’objet d’un déplacement physique au sein du périmètre de chaque œuvre, qui dès lors agit comme un vortex.

A l’heure de l’hégémonie du numérique, la puissance des œuvres aux ondes fourmillantes de Rob de Oude semble donc se situer au point de jonction entre la tension spatiale qu’elles créent vis-à-vis du spectateur et la dimension humaine d’un mode opératoire qui joue à s’auto-dénoncer, refusant néanmoins de ne se dire plus qu’à demi-mot.

Å’uvres

— Rob de Oude, Black ‘n Blue, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm
— Rob de Oude, Black Band Resonance, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm
— Rob de Oude, Counter Shift, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm
— Rob de Oude, Diamond Cross, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm
— Rob de Oude, Diamond Cross /2, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm
— Rob de Oude, Double Cross, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm
— Rob de Oude, Double Cross /2, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm
— Rob de Oude, Double Feature, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm
— Rob de Oude, Mirrored X /2, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm
— Rob de Oude, Rainbow X’s, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm
— Rob de Oude, Quadrant, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm
— Rob de Oude, Slow Fade, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm
— Rob de Oude, Slow Fade /2, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm
— Rob de Oude, Skewed Parameter, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm
— Rob de Oude, Slanted Direction, 2012. Crayon de couleur sur papier. 20,5 x 20,5 cm

— Rob de Oude, Cross-linear Dissection /1, 2012. Huile sur panneau. 40,5 x 40,5 cm
— Rob de Oude, Cross-linear Vortex /1, 2012. Huile sur panneau. 40,5 x 40,5 cm
— Rob de Oude, Cross-ocular Deflection /1, 2012. Huile sur panneau. 40,5 x 40,5 cm
— Rob de Oude, Inter-crossed Pulsation /1, 2012. Huile sur panneau. 40,5 x 40,5 cm
— Rob de Oude, Paralinear Cross Section /1, 2012. Huile sur panneau. 40,5 x 40,5 cm
— Rob de Oude, Pinking Squared, 2012. Huile sur panneau. 41 x 41 cm
— Rob de Oude, Kiltered Off, 2012. Huile sur panneau. 41 x 41 cm
— Rob de Oude, Orange Realigned, 2012. Huile sur panneau. 41 x 41cm
— Rob de Oude, Mono Para, 2012. Huile sur panneau. 41 x 41cm
— Rob de Oude, Mono Mucho, 2012. Huile sur panneau. 41 x 41cm
— Rob de Oude, Mono Minty, 2012. Huile sur panneau. 41 x 41cm
— Rob de Oude, Arithmetic-Tock, 2012. Huile et acrylique sur panneau. 41 x 41cm
— Rob de Oude, Fanning a Recurring Past, 2012. Huile et acrylique sur panneau. 41 x 41cm
— Rob de Oude, Pent Up Pin Wheel, 2012. Huile et acrylique sur panneau. 41 x 41cm
— Rob de Oude, Tangibility Paradoxed, 2012. Huile et acrylique sur panneau. 41 x 41cm
— Rob de Oude, Forrest and the Trees, 2012. Huile et acrylique sur panneau. 41 x 41cm

— Rob de Oude, A Perceptual Sense of Recknoning /1, 2012. Huile et acrylique sur toile, 137 x 137 cm
— Rob de Oude, Appeared Avoidance /1,2012. Huile et acrylique sur toile, 137 x 137 cm
— Rob de Oude, Appeared Avoidance /2,2012. Huile et acrylique sur toile, 137 x 137 cm

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