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Terra. Matière et symbole. Art, vidéo, photo

La Terre à travers les arts, symbole maternel, peau, limite, etc. fait l’objet d’une exposition au Fort di Bard, dans la Vallée d’Aoste, regroupant des œuvres de la Renaissance italienne à l’Arte povera.

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Sous la direction d’Enrico Crispolti et Pierluigi Carofano
Terra. Matière et symbole. Art, vidéo, photo

Ce catalogue est publié à l’occasion de l’exposition qui au lieu à Forte di Bard, Vallée d’Aoste, du 18 mars au 31 août 2008.

Extrait de «La Terre. La philosophie « en exposition »», par Ugo Perone

«La « philosophie en exposition » est une expression sciemment ambiguë. On peut l’interpréter soit comme une tentative, originale certes, mais aussi un peu périlleuse, de donner une représentation figurative de théories philosophiques, soit comme l’intention, plus modeste, d’expliciter la philosophie d’une exposition, à savoir l’ »esprit », ou l’idée guide pour reprendre l’acception anglo-saxonne du terme. Mon propos dans ces lignes, et le dessein que j’ai essayé de poursuivre en collaborant à l’exposition, est par surcroît encore autre chose. Toujours en relation avec ces deux significations, mais avec une ambition différente.

La première définition, en effet, se heurte à la difficulté de donner une représentation figurative à un univers conceptuel. La seconde, en revanche, est subordonnée à un usage banalisant du terme philosophie, qui fait que l’on arrive à entendre parler de philosophie à propos de n’importe quoi (d’un spectacle, d’une industrie, d’un produit). La première option est donc vouée à l’illusion, la seconde condamnée à la banalité. Comment sortir de cette impasse ? Ou, sur un plan plus personnel, comment imaginer un philosophe de métier intervenir dans des domaines disciplinairement différents sans perdre sa vocation ? Le tout est de vérifier ce que j’ai voulu mettre en évidence avec ce « en » dans le titre. Se défaire donc de l’idée de faire une exposition « de » philosophie, et pas en arriver à expliciter l’idée guide — la philosophie dans le sens anglo-saxon — « de » l’exposition. Tout ceci — c’est là le pari dans lequel je me suis laissé entraîner — est non seulement possible, mais devient même nécessaire si l’on veut éviter qu’une exposition organisée autour d’un thème soit un répertoire plutôt anodin des infinies représentations iconographiques de celui-ci. Dès lors qu’on choisit un thème et qu’on le circonscrit,

La philosophie peut en effet avoir voix au chapitre, pour autant que ce thème, avant encore que dans la tradition iconographique et en tout cas indépendamment de celle-ci, ait eu dans l’histoire de là pensée un rôle et un développement propres. Il arrive ainsi qu’un regard philosophique, sans prétendre définir le fil conducteur, ni obliger à sélectionner seulement les pièces iconographiques qui le représentent, peut être un critère d’orientation important, tant dans le choix des thèmes, que dans la mise en exposition de ces choix. La philosophie, sans contaminations ou confusions, peut alors avoir son rôle « en » exposition, un peu comme une basse continue qui accompagne le visiteur tour comme elle a assisté le commissaire. Ce n’est pas que l’art cesse d’être art et que la philosophie n’est plus philosophie, mais un dialogue devient possible. Du reste, une exposition n’est pas seulement une anthologie de documents historiques, ce n’est pas non plus seulement l’exhibition de belles ceuvres, mais c’est aussi une proposition d’idées. Cela vaut la peine alors d’en débattre et de les contextualiser dans l’histoire de la pensée dans laquelle elles ont germé.»