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Te umu ti, Te umu ti

24 Nov - 22 Déc 2007

Entre photographie et vidéo, Élodie Lecat tisse un univers onirique où la contemplation dérive vers un oubli de soi, stigmatise la disparition et la vacuité du réel, ouvre les possibilités d’une intériorité à explorer.

Communiqué de presse
Élodie Lecat.
Te umu ti, Te umu ti

Te umu ti, Te umu ti. Au tout début du XXe siècle, Victor Segalen, jeune médecin de la Marine française converti à l’ethnologie, rapporte combien il fut impressionné en voyant les Tahitiens marcher sur le feu, en plein milieu de l’été, alors qu’une famine approchait. Le Umu ti avait été provoqué, et il fallait faire cuire des tubercules «Ti», qui ainsi, pourraient être conservées pendant de longs mois… Dominer le feu, dépasser la brûlure, maîtriser la faim : cuire les tubercules, puis traverser le four, marcher sur les braises et s’approcher au plus près de ce qu’il faudra manger. Segalen est fasciné.

Te umu ti, Te umu ti. Élodie Lecat, elle, elle ne sait pas si une famine va arriver. Elle n’a jamais mangé de Ti. Elle n’est pas Tahitienne. Elle ne sait pas éviter les brûlures. Mais son travail parle depuis longtemps des pierres et du feu (Sans titre, bombes volcaniques, 2005) ; il montre des plages sur lesquelles il suffit de courir pour avoir l’air heureux (Sans titre, sur la plage, 2006). Il exhibe des rivages comme autant de géologies de la terreur (Sans titre, la plage, 2005) ; des îles dans lesquelles débarquer veut dire disparaître, comme dans l’Avventura d’Antonioni, etc. Dans son travail on pouvait lire à un moment : «not too much flowers please. Et puis aussi, on pouvait entendre, prononcé de très loin : «Acapulco, le Mayflower, y en a un de trop». Et tout cela n’est pas fait pour être compris.

A OUI, elle a décidé de découper l’espace avec une lame noire, fine et aérienne. Elle a aussi construit des blocs massifs, immaculés et blancs. Et l’espace est rempli de structures qui semblent l’évider, le racler comme on tanne une peau, ou comme on nettoie des os, afin qu’il ne reste que le squelette.

Une vidéo montre qu’un enfant a parlé tout seul alors qu’il jouait sur une terrasse. Qu’il a mis sa capuche. Qu’il s’est allongé par terre. Qu’il a parlé encore et s’est relevé. Qu’il a recommencé. Une autre vidéo montre qu’un mouton appuie sa tête contre un rocher. En boucle. Il y a des images aussi. Là encore, tout cela n’est pas fait pour être compris. Car il s’agit peut-être du réel, simplement «le désert du réel».

Le travail d’Élodie Lecat, jeune artiste formée à l’école d’art de Toulouse, fait circuler le spectateur dans des espaces hétérogènes, parfois vastes comme des paysages, parfois étouffants comme des souvenirs irrésolus, bloqués dans des histoires ténues, à l’intérieur de notre tête. Elle propose des zones d’accélération, des trajectoires extrêmement rapides, et soudain des moments de pause, des arrêts, comme si d’une scène il n’était pas possible de passer à la suivante.

Ses oeuvres prennent la forme d’images (petites et domestiques ou immenses, au format de la ville), elles peuvent aussi être des objets, des décors, des enregistrements, du papier-peint, des mobiles en plexiglas, etc. Et pour chacune, invariablement, tout se passe comme si elle convoquait une excessive sophistication, et aussi une brutalité sans nom : naviguer dans le chaos avec fluidité.

Stéphane Sauzedde, novembre 2007

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