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Superstudio. Les enfants du paradis

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@12 Jan 2008

Plus de vingt œuvres vidéo, offertes au rythme de six ou sept par semaine, avec renouvellement de la sélection tous les samedis : beau programme, proposé par la Galerie Yvon Lambert afin de célébrer l’ouverture, il y a un an, d’un espace consacré à la vidéo : le Studio.

Plus de vingt projets vidéo, offerts au rythme de six ou sept par semaine, avec renouvellement de la sélection tous les samedis : beau programme de rentrée, proposé par la Galerie Yvon Lambert afin de célébrer l’ouverture, il y a un an, d’un espace précisément consacré à la vidéo (le Studio).
Ce qui frappe, c’est d’abord la prégnance du dispositif cinématographique : pour la seule troisième semaine, toutes les œuvres prennent la forme de films, presque toutes logées dans un écrin de pénombre et projetées sur un écran. Il est peut-être inutile de le rappeler, mais la forme filmique n’est pas une fatalité pour l’art vidéo, comme en témoignent certaines pièces sculpturales de Nam June Paik.

Qu’est-ce que la vidéo, au fond ? Définition par la négative : une technique de création prise entre deux feux, écartelée entre la télévision à laquelle elle est originellement liée et le cinéma, ou mieux le film, dont elle aura contribué à renouveler profondément les méthodes d’analyse, en conception comme en pratique.
Premier constat : aujourd’hui encore, difficile de se définir pour l’art vidéo sans s’affronter au cinéma, et pas seulement sous ses espèces expérimentales. D’autant que celui-ci s’expose, à son tour, dans des lieux comparables, devenu chose muséale autant que chose industrielle (récemment, l’exposition Hitchcock à Beaubourg).

Que la vidéo d’art trouve à s’instaurer par frottement avec ce qui n’est pas elle — ici, le cinéma, mais ailleurs, la sculpture, la musique ou la danse — constitue sans doute son meilleur atout. Puissance d’assimilation d’arts ou de formes multiples, capable de reprendre, de repenser et, à l’occasion, de ruiner les fondements de représentations antérieures : voilà ce que, il y a plus de dix ans, l’exposition Passages de l’image avait montré, avec force. Toutes proportions gardées, Passages de l’image opère d’ailleurs comme la trame ou la matrice secrète de l’exposition présentée par la Galerie Yvon Lambert, où l’on retrouve Thierry Kuntzel, Chantal Akerman, Peter Fischli et David Weiss, Gary Hill, Michael Snow, Joan Jonas.

Pour lors, cette troisième sélection couvre à peu près tout le spectre de notre univers d’images, depuis le document jusqu’au virtuel, selon que l’œuvre se soucie plutôt du monde, de l’individu ou des technologies de l’image.

Côté monde, on situerait Chantal Akerman et son Hôtel Monterey, hypnotique collection de plans fixes représentant, sous des angles variables, l’intérieur souvent désert dudit hôtel. Le plan se fait ici descriptif, parfois si long qu’il semble épuiser un visible enregistré à la manière des caméras de surveillance (Akerman chez Fritz Lang, au cÅ“ur de l’hôtel du Diabolique docteur Mabuse, la fable en moins). A cela, s’ajouterait l’Essai de reconstitution des 46 jours qui précédèrent la mort de Françoise Guiniou (Christian Boltanski), chronique âpre autant que bressonienne, dont on aimerait bien, un jour, ne plus voir la valeur documentaire… My hate is useless, de Salla Tykkä, ressemble à s’y méprendre à un journal intime — mais est-ce vraiment l’auteur qui retourne ainsi l’objectif vers soi pour filmer, avec dureté, son corps malade ?

A l’autre bout du spectre, on trouve toutes productions affrontant ouvertement la question des technologies de l’image, telles One million Kingdoms de Pierre Huygue ou encore Vagabondia d’Isaac Julien. Petite merveille, Vagabondia répond à une commande du Sir John Soane’s Museum — soit la demeure de l’architecte du même nom, transformée par ses soins en un espace télescopique, montable et démontable à loisir, un peu comme chez Méliès mais en vrai… Au moyen de distorsions visuelles ou sonores et au fil d’un conte qui emprunte sa logique au rêve, Isaac Julien invente le «film siamois», seul capable de rendre compte de la duplicité de la maison Soane.

Semaine 1 (du 12 au 20 sept.)
— Alice Anderson
— Claude Lévêque
— Mark Wallinger
— Fischli & Weiss
— François-Xavier Courrèges
— Koo Jeong-A.

Semaine 2 (du 21 au 27 sept.)
— Gary Hill
— Mircea Kantor
— Slater Bradley
— Jonathan Monk
— Douglas Gordon
— Lawrence Weiner.

Semaine 3 (du 28 sept. au 4 oct.)
— Christian Boltanski, Essai de reconstitution des 46 jours qui précédèrent la mort de Françoise Guiniou, 1971. 19’.
— Chantal Akerman, Hotel Monterey, 1972. 60’.
— Jonathan Horowitz, Je t’aime, 1990. 10’ 20.
— Salla Tykkä, My hate is useless, 1996. 1’ 20.
— Isaac Julien, Vagabondia, 2000. 7’ 17.
— Pierre Huygue, One million Kingdoms, 2001. 6’.
— Anri Sala, Uomo Duomo, 2000. 1’41.

Semaine 4 (du 5 au 12 oct.)
— Valie Export
— Francis Alÿs
— Dan Graham
— Joan Jonas
— Michael Snow
— Thierry Kuntzel
— Vibeke Tandberg.

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