ART | CRITIQUE

Still Moving Image

PMagali Lesauvage
@12 Jan 2008

Pour sa première exposition personnelle en France, l’artiste indienne Sonia Khurana présente son travail photographique et vidéo sur la représentation du corps et de l’«expérience intérieure».

On avait découvert le travail de l’artiste indienne Sonia Khurana, ancienne élève du Royal College of Art de Londres, lors de l’exposition «Indian Summer» organisée par l’Ecole nationale supérieure des beaux-arts de Paris en 2005. A la fois photographe, vidéaste et «performer», Sonia Khurana met son propre corps nu en jeu et en danger dans ses performances filmées.

Sur ce registre, la galerie Jousse Entreprise présente Bird (1999-2000), son œuvre vidéo la plus connue, puisqu’elle fait partie aujourd’hui des collection du Musée national d’art moderne, accompagnée d’une série de photographies en noir et blanc d’instantanés du film. Sonia Khurana s’y met en scène, nue, effectuant dans le silence une danse hasardeuse. L’image trouble et perturbée augmente le sentiment dérangeant. L’artiste expose aux yeux du spectateur son corps large, lui fait subir des déséquilibres dangereux, et ainsi devient sa propre marionnette.
Sonia Khurana, artiste féministe, assume son corps, aux limites du tragique et du burlesque. Elle questionne ainsi les conventions et les normes physiques et morales imposées aux femmes. Selon Sonia Khurana, «dans tous ces actes, le moi est, ironiquement, déjà toujours démantelé, et pas seulement par un dénuement, mais par un discours simultané autour de la (non)-appartenance». Pour Bird, elle utilise son corps comme mode de discours. Les photographies qui l’accompagnent annulent l’effet grotesque de la danse, pour livrer à la vision du spectateur des formes modernes d’études de nu.

«J’organise des rencontres performatives, soit avec moi-même, soit avec les autres, à travers lesquelles j’explore la tension entre différentes forces: publiques et privées, culturelles et libidinales». Les vidéos Head-Hand (2004), Tantra (2004) et Sleep (2006), où l’on retrouve sous différentes formes l’image d’un individu endormi, font référence à cette «vie intérieure» que l’art filmique sait si bien capturer.
Le corps n’est plus ici un moyen de contestation, mais le siège intime de l’inconscient. Il n’affirme plus sa force de subversion, comme le corps en mouvement de Bird; immobile, il est totalement vulnérable, sa capacité de transgression se situe alors «au centre mystérieux de la pensée».

Sonia Khurana
— Head Hand, 2004. Vidéo. Couleur. Silence.
— Head Hand, 2006. Photo. Couleur.
— Tantra, 2004. Vidéo. Couleur. Silence.
— Bird, 1999-2000. Vidéo. Noir et blanc. Silence.
— Bird, 2006. Série de photo. Noir et blanc.

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