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Spasibo, Davide Monteleone

Spasibo est un livre consacré à l’exposition du photographe Davide Monteleone, vainqueur du Prix Carmigniac Gestion de Photojournalisme 2013. Dans ses photos, il dépeint avec justesse la vie quotidienne du peuple tchétchène, entre soumission et résistance, espoir et résignation.

Information

Présentation
Galia Ackerman, Masha Gessen

Davide Monteleone, Spasibo

Davide Monteleone a traversé la Tchétchénie, de part en part. Il a visité des villes, des villages mais aussi des montagnes et des forêts. Il a documenté la vie ordinaire de la minorité Tchétchène: une vie complexe et tourmentée. Ce livre ne contient aucune photo grandiose de paysages urbains ou naturels, ni aucune scène de violence sanglante.

David Monteleone a choisi de nous montrer ce qui est invisible à l’œil nu: l’atmosphère oppressante, le désespoir et la peur qui règne parmi la population, les jeunes femmes résignées à embrasser leur destin, et les personnes âgées, dont l’autorité traditionnelle a été anéantie et, repose désormais entre les mains des brutes du Président tortionnaire Razman Kadyrov. Mais les photographies de Davide Monteleone ne sont pas dénuées d’espoir. Les Tchétchènes sont un peuple montagnard, qui a connu des siècles de guerres et autres atrocités, telle que la déportation massive dans les steppes arides du Kazak et de la Sibérie, sous Staline en 1944.

Au fil du temps, ils ont su comment résister et rester forts. Ils sont capables de rire même en ces temps d’adversité et ont réussi à maintenir un taux de natalité assez élevé pour permettre d’assurer la pérennité de leur peuple.

Ils sont convaincus que ce régime dictatorial sera déchu, tôt ou tard, à l’instar de ce qui s’est produit dans le monde arabe.

«J’ai séjourné dans l’un de ces bâtiments en 1996, alors que la première guerre touchait à sa fin. Grozny était sous occupation militaire: une division de l’armée russe était stationnée dans ce quartier, parmi d’autres. Dans la journée, un bazar fonctionnait entre les blocs de béton à neuf étages : boissons sans alcool, produits déshydratés fabriqués en Chine et importés de Turquie, poulets et gâteaux faits maison. Seuls, les soldats russes e s’aventuraient sur le marché qu’avec précaution; en groupe, ils volaient les vendeurs avec assurance. A la tombée de la nuit, le bazar était replié, les soldats retournaient dans leur base, et les Tchétchènes se réfugiaient dans leurs appartements en attendant ce qui allait arriver quand les soldas russes seraient ivres. Quelques heures plus tard, les soldats russes, ivres et terrifiés, commenceraient à faire feu dans toutes les directions. Les tirs de petite artillerie et de mitraillette se prolongeraient jusqu’à tard dans la nuit. Certains jours, au matin, le quartier découvrirait qu’un jeune homme ou un couple avait eu la mauvaise idée de passer près de la base pendant les fusillades (…)»
Masha Gessen