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Sortie de Vortex

Peintre et sculpteur, Michel Gouéry pratique la céramique avec maestria, employant un registre pour le moins étonnant. L’artiste revendique les modèles iconographiques savants ou biographiques et si toutes ses sculptures sont des concrétions d’associations purement visuelles, elles sont, pour beaucoup, dans une iconographie souvent sexuelle ou scatologique.

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Communiqué
Catherine Millet, Eric Suchère
Sortie de Vortex

Un critique d’art n’est pas un décrypteur des messages chiffrés qui seraient enfouis dans les œuvres et qu’il devrait rendre lisibles au profane. Un critique d’art n’est pas un archéologue qui dégagerait lentement des fragments épars pour les reconstituer en un tout qui lui permettrait d’émettre des hypothèses scientifiques sur une totalité suggérée. Un critique d’art est comme tout le monde. Soit il a l’impression de comprendre tout tout de suite, soit il ne comprend rien, soit il comprend de travers, soit il comprend ce qu’il veut bien comprendre, soit… Il est un peu comme l’artiste qui, tout à son travail, ne saisit pas forcément tout de suite ce qu’il met en place, l’endroit d’où les choses proviennent, ce qu’elles vont produire.

Il s’agira donc de repérer des «trucs» dans ce que fait Michel Gouéry en essayant d’abord de les comprendre pour soi ce qui est rendu difficile par le fait que l’on est en face d’un corpus qui est en train de se faire, que la suite peut — pourra — infléchir la perception du travail, que ce travail lui-même pourra changer de direction et qu’un œuvre n’est pas un tout homogène avançant linéairement dans une direction claire et précise, mais qu’elle est hésitations, bifurcations, culs-de-sacs, brusques bonds…

Il faut dire que l’artiste n’aide pas beaucoup à la compréhension de ses peintures et sculptures, car, en dehors d’un catalogue collectif de 1992 et d’un catalogue monographique de 2002 — fêtant sans doute ainsi un anniversaire —, les publications sur son travail sont soit sans aucun texte — comme les deux catalogues qu’il fit lors de son séjour à la Villa Médicis —, soit avec des textes de fiction d’auteurs qui ont pour consigne de ne pas écrire sur l’oeuvre ou — surtout — d’écrire sur tout autre chose, soit des textes de l’artiste lui-même, savoureux textes de fiction qui échappent aux règles du genre. Bref, presque rien dans les catalogues et seulement quelques rares publications dans des revues et journaux.

Donc, pas de déclarations d’artistes ou peu d’approches critiques sur lesquels s’appuyer — quelles que soient les dénégations de Michel Gouéry — Qu’il s’agit, à défaut d’une stratégie, d’une attitude ou d’un positionnement clair et conscient afin d’éviter l’enfermement du travail par une pensée critique et que cette volonté renvoie au travail lui-même, à ce qui en constitue sa nature. A savoir, est-ce que ce travail est formel ou parodique, formellement parodique ou parodiquement formel, sérieux ou ironique ou sérieusement ironique, etc.?