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Rouan le peintre/ Tombeau de Francesco Primaticcio

Un auteur mort qui écrit la vie d’un peintre né quatre cent soixante-neuf ans après lui, l’inventaire de ses objets vus dans son atelier et qui trouve dans l’oeuvre de Primatice (Francesco Primaticcio), une occasion de réflexion, non dépourvue de contestation, que de la matière

Information

Présentation
Dominique Cordellier, François Rouan
Rouan le peintre/ Tombeau de Francesco Primaticcio 

Tombeau de Francesco Primaticcio 
À l’automne 2004, le Louvre a consacré à Francesco Primaticcio une grande exposition rétrospective. Dans six vestibules de ses salles, François Rouan avait distribue* les éléments d’un cénotaphe à la mémoire du maître de Fontainebleau, fait de tableaux fragmentaires, de séquences photographiques et d’un court-métrage intitulé Di sotto in su.

Chaque morceau, chaque partie y étaient la condition des autres : les photographies saisissaient la lumière d’un modèle, en effleuraient la chair, voire la vraisemblance, à travers l’éphémère transparence de dessins colorés, exécutés au pinceau et appelés à devenir peintures, sinon tableaux. Le film procédait de même et intégrait à son tour les bandes photographiques. Les motifs primaticiens, décousus, apportaient des morphèmes à l’abstraction de la composition. Ils affleuraient par bribes, reconnaissables et méconnaissables tout à la fois, déplacés, découpés, compactes, répétés, transférés. Leurs signes, relevés de la pointe du pinceau, ponctuaient la complexité du visible et en accentuaient la durée. Et la mémoire qu’ils nourrissaient n’était pas toujours, tant s’en faut, pieuse.

Émue par ce que le dessin de Primatice, poussé à sa perfection, peut avoir d’illisible, troublée par l’éros qui l’anime, cette mémoire exprimait aussi une réticence à l’égard des illusions virtuoses, un refus du passif académique et la conscience qu’il s’agissait d’un art aussi perdu qu’une langue peut être morte, un art devenu, comme le latin ou le grec, silencieux et savant, sûrement porteur de sens mais inadapté à la communication, un art qui, comme la peinture en elle-même (dirait le sens commun), ne sert à rien et auquel on revient sans cesse.

Des témoignages de cette mémoire inutile et impérieuse, composés par François Rouan, sont présentés dans ce second volume, avec quelques fragments de ce tombeau éphémère.

Rouan le peintre
La biographie d’un peintre vivant (François Rouan) écrite par un peintre mort depuis un peu plus de quatre siècles (Giorgio Vasari) ; l’inventaire de l’atelier de ce peintre vivant, dressé avant décès; la vie d’un peintre des temps passés (Francesco Primaticcio) qui gît dans un tombeau composé par le peintre vivant – comme Louis Couperin a composé le Tombeau de Blancrocher, Mallarmé’, le Tombeau de Baudelaire, et Pierre Boulez, un Tombeau sur le Tombeau de M. à Verlaine: voilà la matière de ce premier volume.

François Rouan (le peintre vivant): né en 1943, l’une des figures les plus singulières de la peinture d’aujourd’hui, héritier de Matisse à travers l’École américaine, émule et ami de Simon Hantaï. À distance du groupe Support/ Surface, il a su faire de la toile, en la retissant une fois colorée et en la repeignant une fois retissée, un acteur à part entière de la constitution du tableau. De même avec le papier, la bande photographique ou le film, qu’il tresse aussi à sa façon.

Giorgio Vasari (le peintre mort) : le célèbre artiste historiographe toscan qui a écrit la vie des plus fameux peintres, architectes et sculpteurs de la Renaissance (1550, 1568).

Francesco Primaticcio, dit le Primatice (le peintre des temps passés) : contemporain de Vasari, il acclimata en France l’ingegno et l’arte, la venustà et la terribilità de la grande manière italienne pour les derniers Valois et y développa ce que nous appelons à présent l’École de Fontainebleau.