DANSE | SPECTACLE

Extradanse | And so you see…

06 Avr - 07 Avr 2018

Solo mi-performé, mi-dansé, And so you see... s'inscrit dans le contexte de l'Afrique du Sud post-apartheid. Entre burlesque queer et poésie, la chorégraphe contemporaine Robyn Orlin livre un spectacle en forme de charge politique et symbolique. Avec la performance unique d'Albert Ibokwe Khoza.

Avec And so you see… La chorégraphe berlinoise, d’origine sud-africaine, Robyn Orlin, revient sur son pays de naissance. À savoir sur le devenir de l’Afrique du Sud post-apartheid. Entre humour extravagant et constat amer, entre danse et performance théâtrale, And so you see… endosse les traits du danseur et performeur Albert Ibokwe Khoza. Et comme souvent avec Robyn Orlin, le nom de la pièce est énigmatique, à tiroirs. La création de 2016 n’échappe pas à cette signature : And so you see… our honourable blue sky and ever enduring sun… can only be consumed slice by slice… [Et ainsi, voyez-vous… nos honorable ciel bleu et perpétuel soleil… ne peuvent être consommés que tranche par tranche]. Sur scène, Albert Ibokwe Khoza déploie son corps opulent, androgyne, ainsi que sa voix aérienne de soprano. Personnage troublant, il incarne ainsi une forme de réponse ironique au violent « retour à l’ordre » qui secoue une partie de l’Afrique du Sud.

And so you see… de Robyn Orlin : entre danse contemporaine et solo queer

Après l’élan de la nation arc-en-ciel et la Commission vérité et réconciliation, l’Afrique du Sud connait néanmoins encore des formes de violences, inégalités et dysfonctionnements. Lynchages d’immigrés zimbabwéens, nigérians, éthiopiens ; recrudescence de l’homophobie ; viols correctifs (pour rééduquer les homosexuels) ; assassinats de mineurs grévistes par la police (à Marikana) ; taux de criminalité record, sécheresse et restriction d’eau potable (au Cap)… À ce climat tendu, Robyn Orlin répond alors par le burlesque, avec un spectacle en forme de solo, ou presque, dans une ambiance queer un peu déjantée. Face à une vidéo mettant en scène un sample de Vladimir Poutine esquissant un pas de danse, monté en boucle, et sur un fond de Requiem inachevé de Wolfgang Amadeus Mozart, en diva exacerbée, Albert Ibokwe Khoza, s’exclame : « Awww, Putin! Putin! Thank you for coming! » [Poutine, Merci d’être venu !].

Un « requiem pour l’humanité » : la performance unique d’Albert Ibokwe Khoza

Autour des sept péchés capitaux de la religion catholique (avarice, colère, envie, gourmandise, luxure, orgueil, paresse), And so you see… développe ainsi une pièce chorégraphique luxuriante et symbolique. Et définitivement politique. Sur scène, un dispositif de projection vidéo importe le monde, tout en servant de dispositif autoréflexif. Entre conscience de soi et conscience des autres, And so you see… déploie, pour emprunter les mots de la chorégraphe Robyn Orlin, un « Requiem pour l’humanité ». Comme un contrepoint au Requiem inachevé, avec cette idée, peut-être, d’une humanité en construction. Entre humour acide, poésie et incantation adressée à une humanité qui se perd parfois de vue, And so you see… oscille ainsi entre l’humour et une forme de déchirure intense, presque incrédule.

Itinéraire du spectacle :
– Pôle-Sud, CDCN Strasbourg, dans le cadre du festival Extradanse, les 6 et 7 avril 2018.
– Maison de la Danse (Lyon), les 2 et 3 mars 2018.

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