LIVRES

Robert Morris.

Présentation
Contrepoint- De la Sculpture, Musée du Louvre (5 avril-25 juin 2007).
Commissaire: Marie-Laure Bernadac, conservateur général du patrimoine et chargée de mission pour l’art contemporain au Louvre.
Dans le cadre du troisième volet de Contrepoint au Musée du Louvre dédié cette année à la sculpture, Audrey Norcia est allée à la rencontre des onze artistes internationaux invités à dialoguer avec les collections du musée. Tous sont issus de traditions artistiques déterminées: l’Arte Povera pour Luciano Fabro, Giuseppe Penone et Claudio Parmiggiani; la sculpture anglaise et américaine pour Robert Morris, Richard Deacon et Anish Kapoor; et enfin, diverses tendances du renouveau français avec Elisabeth Ballet, Gloria Friedmann, Didier Trenet, Michel Verjux et Jacques Vieille.
Leurs interventions se situent dans le département des Sculptures (Aile Richelieu, Cours Marly et Puget; aile Denon, galeries Donatello et Michel-Ange) ainsi que dans le département des Antiquités Orientales (Cour Khorsabad).
Chaque artiste a choisi son site, en réponse à un ensemble statuaire ou à une sculpture en particulier, afin de proposer, à l’occasion de cette relecture des œuvres anciennes, une pièce nouvelle dans la plupart des cas.

Interview
de Robert Morris
Par Audrey Norcia

Vous vous intéressez à l’interprétation du David de Michel-Ange, cette figure colossale de l’histoire de l’art, mais surtout à la manière dont elle a été récupérée par nos sociétés pour en faire une image moderne. Pourriez-vous nous décrire vos intentions, à travers les récits des deux conférenciers mis en scène sur le mode burlesque dans la vidéo?
Robert Morris. Je crois que mes intentions ne sont pas importantes. Ce qui compte, c’est le résultat. Comme disait Duchamp (sic) «The artist makes the work and the viewers tell him what it is».

Donatello avait réalisé, entre les années 1430 et 1440, sur commande de Cosme de Médicis, un juvénile et gracieux David en bronze: nu, mais chaussé, il tient dans la main droite la pierre qui lui permit d’abattre Goliath, et dans la gauche l’épée de celui-ci vaincu. Son pied repose sur la tête de l’ennemi terrassé; un casque recouvert d’une couronne de laurier célèbre sa victoire. Cette représentation est une personnification glorifiant la cité de Florence, jeune puissance économique et culturelle. Le petit David biblique devenu ce géant de 5 mètres sous le ciseau de Michel-Ange n’est-il pas le nouvel héros d’une civilisation actuelle? C’est du moins ce que suggère votre vidéo…
Robert Morris. C’est l’une des interprétations possibles.

Mais cette vidéo renvoie aussi à votre performance 21.3 de 1964 où vous étiez habillé en orateur; debout derrière un podium, mimant la lecture de L’Essai iconographique et iconologique d’Erwin Panofsky, tandis qu’une bande son préenregistrée de votre voix était diffusée. Comment concevez-vous votre rôle de théoricien de l’art?
Robert Morris. Le philosophe américain Saul Kripke a formulé la chose suivante sur l’une de ses théories: «C’est vraiment une bonne théorie. Le seul défaut, à mon avis, c’est que cela est probablement commun à toutes les théories philosophiques. C’est faux». Je dirais la même chose au sujet des théories de l’art, y compris la mienne.