ART | EXPO

Radio ghost

23 Jan - 07 Mar 2004

Action en suspens, histoire sans dénouement, absence d’information, les vidéos de Laurent Grasso poussent à l’interrogation. Fini les réflexions pré-mâchées. À chacun de trouver des indices et de scruter les images.

Laurent Grasso
Radio ghost

Transcrire l’invisible, telle pourrait être une des définitions possibles du travail de Laurent Grasso. Produite et exposée par le Crédac, la nouvelle oeuvre vidéographique de l’artiste propose au spectateur une vision, un regard sur la construction paradoxale de nos paysages contemporains, placés sous l’égide d’une haute technologie, d’un cartésianisme absolu, mais aussi d’une appréhension religieuse, païenne, superstitieuse de la vie…

A travers ses vidéos, Laurent Grasso propulse le spectateur dans un état limite. Comme un test sur sa capacité à lire une image, une déambulation dans un univers étrange. Que se passe-t-il ? Presque rien, ou plutôt d’innombrables indices qui laisseraient présupposer une action, un soupçon de narration. Dès lors le spectateur attend, extrapole, imagine que quelque chose s’inscrive dans ces films et Laurent Grasso met à jour ses contradictions : tenaillé entre son désir d’une vidéographie qui raconte, annonce, démontre ou représente, selon l’usage quotidien qu’il fait des images en mouvement ; et ce qu’il voit, ce que Laurent Grasso lui donne à lire : l’inextricable frustration, l’expérience par défaut.

«Soyez les bienvenus» (1999) est une vidéo qui met en place un dispositif de manque, d’absence. Une foule massée en cercle est filmée : la caméra s’en approche, en dessine les contours, tente de saisir la raison centrale du regroupement et de percer, en vain, le mystère. On ne connaîtra jamais l’objet de toutes les attentions et le spectateur de la vidéo reste sur sa faim, à moins qu’il ne perce le secret de cette oeuvre, se laisse bercer par l’altérité qui la gouverne et sache débusquer ses propres fantasmes ou angoisses. La série de vidéos «Mes actrices» (1998-2001) convoque, quant à elle, un malaise perceptible sur la représentation de soi et la dépossession de cette image. Dans des espaces publics, Laurent Grasso prend en chasse des femmes inconnues. Il les filme dans leur comportement quotidien jusqu’au moment où elles s’aperçoivent de la présence voyeuriste de la caméra. Après montage, les vidéos insistent sur les séquences qui dissèquent la rencontre, le face-à-face. Actrices malgré elles, les inconnues dévoilent leur personnalité, modifient leur comportement, s’affublant alors d’une attitude de défi, de séduction ou encore de mépris. L’image volée et la manipulation de l’autre sont au coeur de ce travail.

Commissaire
Claire Le Restif

Article sur l’exposition
Nous vous incitons à lire l’article rédigé par Muriel Denet sur cette exposition en cliquant sur le lien ci-dessous.

critique

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