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Psychopompes divers

Nadine Blandiche, Hervé Ic, Marc Molk, Emile Morel, Florence Obrecht, Franck Rezzak, chacun se réapproprie les formes et les couleurs de la figuration pour franchir le seuil du réalisme. Les styles se croisent sans se confondre, évoquant l’esthétique de la science-fiction et de la bande dessinée, sous l’auguste patronage d’un maître de l’horreur des années 70-80, le réalisateur George A.Romero. L’ombre des silhouettes de morts-vivants plane sur l’exposition, initiant tout un cortège de métamorphoses, brisant le lien fragile des certitudes.

Le titre énigmatique de Psychopompes divers fait référence à ces figures de passeurs guidant les âmes vers d’autres territoires, dont les mythologies antiques et modernes ont multiplié les attributs d’une civilisation à l’autre. S’il est besoin de passeurs pour s’aventurer vers les replis déformés du réel et les profondeurs abyssales de la nuit, c’est d’abord pour appuyer la présence d’un seuil et le moment du franchissement.
Les nombreuses portes de Franck Rezzak tracent la perspective de ces chemins fuyants gardés par des êtres hybrides, mi-homme mi-cochon, mi-femme mi-méduse. Door est le titre qu’il donne à des représentations très différentes les unes des autres. Aucune ne reproduit une porte au sens habituel que nous donnons à ce mot, mais toutes figurent un passage symbolique vers un royaume fantastique, propulsé par un carambolage des formes et des genres.

Les compositions digitales d’Emile Morel s’inscrivent le droit fil des visions profuses et délirantes de Jérome Bosch, consacrant l’impuissance du regard à discerner les replis d’une vitalité en ébullition et à composer un ensemble arrêté. 

Les détours de l’imagination vers les compositions hybrides ne sont pas le seul point de passage au-delà du miroir. A partir d’un canevas très réaliste, Hervé Ic superpose par transparence hallucinations et scènes décalées, tramant un palimpseste pictural déconcertant.

Les cinq artistes réunis par Albert Benamou proposent chacun une fantasmagorie singulière, mais en véritable passeur, celui-ci a choisi d’imbriquer les unes dans les autres les facettes de ces différents univers, multipliant les seuils et brouillant les codes propres à chaque style.

Nadine Blandiche
— Oxymoron, 2004. Résine, cuir, métal. 120 cm de hauteur

Hervé IC
— Genèse de l’Amour, 2007. Acrylique et huile sur toile. 170 x 210 cm

Mark Molk
— Les pleurnicheurs, 2005. Huile et acrylique sur toile. 195 x 130 cm

Florence Obrecht
— Famille Adam’s, 2007. Huile, acrylique et aérosol sur toile. 250 x 200 cm

Franck Rezzak
— Door n°22, 2006. Technique mixte sur toile. 114 x 146 cm

Emile Morel
— La créature du marais, 2008. Tirage lambda contrecollé sur aluminium. 150 x 100 cm