ÉCHOS
02 Déc 2010

Picasso: 271 œuvres inédites refont surface

PElisa Fedeli
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Les héritiers de Picasso ont déposé plainte contre son électricien, qui a révélé au grand jour un ensemble inédit de 271 œuvres du peintre. Recel ou don? La justice devra trancher.

On imagine bien la surprise — pour ne pas dire le choc — des héritiers de Pablo Picasso, lorsqu’un beau jour de janvier 2010 ils ont reçu une demande d’authentification concernant des œuvres qu’ils n’avaient jamais vues et qui ne figurent dans aucun inventaire! Plus grand encore a dû être leur étonnement, quand ils ont appris qu’elles étaient stockées depuis plusieurs années au domicile de Pierre Le Guennec, un électricien à la retraite…

Les 271 œuvres de cet ensemble sont totalement inédites et constituent un témoignage inestimable pour l’histoire de l’art. Datées de 1900 à 1932, elles s’échelonnent des débuts difficiles de Picasso à Paris à l’épanouissement du cubisme. Elles sont principalement des dessins, des gouaches sur papier et des lithographies. De nombreuses études documentent des moments-clés, comme cette aquarelle de la période bleue, ces portraits de la manière ingresque, ces études de faux marbres et cette peinture de sable. Quelques raretés sortent du lot, comme ces neuf collages cubistes qui valent bien à eux seuls une quarantaine de millions d’euros.

Agé de 71 ans, Pierre Le Guennec affirme qu’il n’avait pas conscience de la valeur d’un tel corpus. Il déclare les tenir directement du maître et de sa dernière épouse, Jacqueline Picasso. Le problème est qu’aucun des deux n’est plus là pour venir étayer ses propos. L’électricien retraité dit avoir travaillé durant trois années dans les différentes résidences qu’occupait le couple sur la Côte d’Azur, à Vauvenargues, Mougins et Cannes. Dans la dernière d’entre elles, surnommée «La Californie», Picasso a résidé peu de temps mais a entassé toute sa collection en vue de l’inventorier.

Que l’électricien se soit manifesté de lui-même et en toute naïveté penche en sa faveur. Toutefois, de lourds soupçons pèsent sur lui.
L’accusation de faux a d’abord été balayée. D’une part, aucun faussaire n’est capable de tant de maîtrise dans des techniques aussi variées. D’autre part, aucune personne extérieure n’aurait pu connaître les numéros d’inventaire qui figurent sur certaines feuilles.

Les héritiers du peintre, représentés par la Picasso Administration, ont finalement porté plainte pour recel. L’attachement de l’artiste à conserver toutes les traces de ses travaux leur semble incompatible avec un don de si grande ampleur: «Il ne se séparait jamais de morceaux de son œuvre en bloc. Donner une telle quantité, ça ne s’est jamais vu, cela ne tient pas debout, franchement. C’était une partie de sa vie. Cela n’a pas de logique, puisqu’on retrouve des lithographies en plusieurs exemplaires, ou des paquets qui correspondent à des périodes bien précises. Certes, Pablo Picasso était assez généreux. Mais il datait, signait et dédicaçait toujours ses dons» (interview de Claude Picasso pour Libération, 29 nov. 2010). Mais, pour prouver le recel, il faudra démontrer que les œuvres ont été volées sciemment.

L’ensemble a été saisi au domicile de l’électricien par l’Office de lutte contre le traffic des biens culturels (OCBC). Recel ou don? La justice devra trancher.
En attendant, le trésor est bien gardé.

Lire sur paris-art.com:
La suite de l’affaire Picasso

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