ART | EXPO

Pétrone / Pétrole

12 Avr - 18 Mai 2013
Vernissage le 12 Avr 2013

Pétrole, l’ultime œuvre de Pasolini, que l’on comparait volontiers à Pétrone, se voulait comme un roman-fleuve faisant la somme de ses expériences et souvenirs. Il ne nous en reste néanmoins que des esquisses préparatoires trouées de blancs. Les œuvres ici présentées rendent hommage à la beauté de ce texte auquel elles se trouvent associées.

Jean Baptiste Bruant et Maria Spangaro, Jay Chung et Q Takeki Maeda, Hanne Darboven, David Jourdan, Lisa Holzer, Monica Majoli, Fabian Marti, Carol Rama, Anne-Laure Sacriste, Josef Strau et Benjamin Swaim
Pétrone / Pétrole

On n’en sort pas des notes perdues du livre à venir qui ne viendra plus, du vide abyssal que laisse un texte non fini. On croirait toucher paradoxalement, par cette absence même, «l’abîme d’en dessous le mal qui était le mal lui même [ et qui ] vient de surgir dans la lumière du langage.»(Michel Foucault, Naissance de la clinique, Paris, PUF / Quadrige, 1994, p. 199.)

A la différence près que, ici, continuant le jeu d’oxymores chères à Foucault, c’est par la négation du texte que l’on perçoit cet abîme. Si l’écriture recouvrait un fond sans fond, le texte perdu le dévoile. Il nous reste alors à sonder l’œuvre non finie, l’ébauche comme ce qui a survécu au désastre, son signe intangible. Il nous reste à lire et relire à s’en abîmer les yeux, à suivre les traits des esquisses préparatoires, à recouper les textes, à sonder les blancs qui le trouent — des noirs.

Peut être en sont elles d’autant plus précieuses, d’ailleurs, ces notes, lourdes de la beauté qui n’a pas survécu à leur destruction ou que leur inachèvement a empêché.

Une beauté supplémentaire, qui se surajoute à la beauté de la prose de Pasolini — son ultime prose, Pétrole, écho de celle de Pétrone (On a pu parler de Pétrole de Pasolini comme d’un «Satiricon moderne»), dont le récit de la fuite de l’objet du désir fait écho au manque au cœur de son texte, incomplet.

Il faudra alors se plonger dans le noir (bruant&spangaro, Fabian Marti, Anne Laure Sacriste, Benjamin Swaim) dans les ébauches comme dans les imprimés (Monica Majoli, Carol Rama), dans les textes (Hanne Darboven, Lisa Holzer, David Jourdan, Josef Strau), non pas pour retrouver quoique ce soit de perdu, mais bien garder la beauté dont ces œuvres, comme celle des textes auxquels on aura pris plaisir à les associer, sont l’indice. Car, au final, ces notes sont bien la preuve de leur souvenir et pas de leur perte.

Curateur Vincent Romagny

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