LIVRES

Peter Downsbrough. Position

Catalogue rétrospectif de l’œuvre de Peter Downsbrough qui permet d’embrasser quarante ans de pratique artistique. Une réflexion sur le langage et l’espace menée via de mutliples techniques (photos, films, livres, wall pieces et maquettes) et qu’explicitent parfaitement quatre essais, complétés par de nombreuses illustrations de ce travail aux limites de l’abstraction.

— Éditeurs : Mamco, Genève / Palais des Beaux-Arts, Bruxelles / Espace de l’art concret, Mouans-Sartoux / Muzeum Sztuki, Lodz / Argos éditions, Bruxelles
— Année : 2003
— Format : 22 x 27 cm
— Illustrations : nombreuses, en couleurs et en noir et blanc
— Pages : 173
— Langue : français
— ISBN : 90-74816-33-9
— Prix : non précisé

A Tale of the Space Between
par Marie-Thérèse Champesme (extrait, p. 29-30)

Comme DEDANS/ET, ET, ET, ET (MISE EN PLACE) et bien d’autres pièces de Downsbrough, POSITION, outre sa dimension auto-référentielle, donne à lire l’architecture environnante. Ou plus exactement, elle l’inscrit à l’intérieur de l’œuvre elle-même; cessant d’être un simple support, le mur blanc envahit le mot coupé et pénètre dans les aplats noirs par les mots en réserve. En disséminant des éléments dans l’espace et en invitant le regardeur à les relier entre eux, Downsbrough attire l’attention sur les entre-deux (les détails architectoniques); il crée aussi un lieu de déambulation où chacun est libre, par ses déplacements, de faire naître des déplacements de sens. «Les pièces ne sont pas des «objets» mais plutôt des éléments qui engagent le sujet dans un dialogue» [Peter Downsbrough, 30.08.1989, extrait du communiqué de presse de la galerie Hoffmann, Francfort] Les espaces entre ne sont pas des vides mais une ouverture au lieu comme à l’interprétation du spectateur.

Si le thème de la position est pour Peter Downsbrough «de la plus extrême importance» [«Position seems to be the the least discussed topic while being, in fact, the topic of ulmost importance», Peter Downsbrough, Notes inédites, 1985] (le choix du titre qu’il a donné à cet ouvrage est significatif), on ne peut le dissocier de celui de l’ouverture. Par delà la diversité des médiums signe — qu’il ne se laisse enfermer dans aucune catégorie — l’œuvre de Downsbrough est réflexion sur la langue et la structuration de l’espace, bases de nos schémas de pensée et de nos façons de vivre. Dans ses sculptures comme dans ses livres, ses vidéos, ses films ou ses pièces sonores, il crée des discontinuités et rompt ainsi cette familiarité avec les mots et les lieux qui nous empêche trop souvent de voir. Ces intervalles, ces silences, ces blancs sur le mur ou la page donnent au contexte une place à l’intérieur même de l’œuvre. Ils sont aussi un espace de liberté offert au regardeur.

L’espace entre de Downsbrough, ce n’est pas un intervalle donné ou acquis, c’est un jeu, une ouverture, une place pour l’autre. C’est un espacement, «l’index d’un dehors irréductible, et en même temps d’un mouvement, d’un déplacement qui indique une altérité irréductible.» [Jacques Derrida, Positions, Paris : les éd. de Minuit, 1972, pp. 107-108]

(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions du Mamco)