PHOTO

Peintures et sculptures

PStéphanie Courty
@30 Sep 2009

Deux pierres sont face à face, reliées par une simple tige de fer. Une toile immense, blanche, avec seulement un carré de nuances grises. L'un des cotés d'une plaque de fer rouillée posée sur le sol épouse la forme du rocher qui le regarde. Les derniers travaux du célèbre artiste coréen Lee Ufan.

Le fer et la roche sont ici les matériaux de Lee Ufan. La nature est opposée à la matière industrielle. Tout n’existe qu’à contrario. Jeux de plein et de vide, de légèreté et de pesanteur. Lee Ufan redéfinit l’espace et le temps en confrontant les éléments naturels aux productions humaines et industrielles.

Pour Lee Ufan, peindre signifie déposer «des points d’énergie sur la toile». A première vue, ses toiles se ressemblent. Immenses, pures, elles ne portent qu’une trace unique grise, celle d’une brosse épaisse enduite de noir et de blanc.
La couleur est absente dans cette dernière série de 2008. Le rouge, le bleu étaient sûrement trop proches de la réalité. La non-couleur de Lee Ufan est «une couleur qui n’existe pas, entre l’intérieur et l’extérieur».
La trace ainsi laissée est celle du corps de l’artiste, et celle de l’acte de la déposer à un endroit précis. Il ne s’agit nullement d’une pratique systématique. Lee Ufan insiste sur l’unicité de chaque Å“uvre, sur son caractère provisoire et hors du temps. Il nous fait vaciller dans un univers ni tout à fait réel, ni tout à fait illusoire.

L’ascétisme de Lee Ufan est apaisant. Sa peinture est réduite à sa plus simple expression, la sculpture épurée jusqu’à l’extrême. La couleur est absente, la main parvient à s’effacer derrière l’œuvre.
Difficile de comprendre une telle démarche sans évoquer les philosophes qui l’accompagnent, Levinas et Heidegger en particulier inspirent cette Å“uvre sans doute plus encore que l’histoire de la peinture. De fait, le mouvement Mono-ha, dans lequel se reconnaît Lee Ufan, place l’art au cÅ“ur de l’histoire de la philosophie, et considère que chaque Å“uvre n’est artistique que par sa dimension transcendante.

Ainsi, Lee Ufan questionne notre rapport au temps, à la matière, situe son Å“uvre au cÅ“ur de la dichotomie temps naturel-temps artificiel. Dans l’espace central de l’exposition, les sculptures dialoguent avec les toiles blanches. On est au centre de ce mouvement entre la pesanteur des matériaux des sculptures et la légèreté des toiles.

Les œuvres présentées au premier étage de la galerie sont plus anciennes: la couleur est encore présente, et les œuvres plus concrètes, le vert ou le bleu étant des couleurs de la nature. «Si je choisissais une couleur, commente Lee Ufa, elle exprimerait immédiatement une particularité. C’est pourquoi je choisis le ton gris. Il garde une certaine distance, aussi bien avec la réalité qu’avec le monde conceptuel. Il est suffisamment suggestif et implicite».

Le travail de Lee Ufan est une invitation à la méditation, l’Å“uvre n’existe que par la pensée qu’elle stimule. Une utopie? Peut-être, mais l’effet produit par ces toiles et ces sculptures est bien réel.

Lee Ufan
Relatum – Silence, 1979 – 2009. Iron plate, natural stone. 300 x 220 x 1 cm.
Relatum – Respnse, 2009. Iron plate, natural stone. 150 x 140 x 2 cm (iron plate). 60 x 60 cm (natural stone).
Relatum – Counterpoint, 2004. Iron plate, natural stone. 200 x 3 cm. 30 x 30 cm.
Dialogue, 2008. Oil oncanvas. 218 x 291 cm.
Dialogue, 2009. Oil on canvas. 218 x 291 cm.
Dialogue, 2009. Oil on canvas. 2180 x 291 cm.
Dialogue, 2009. Watercolor on paper. 77 x 103 cm.
Dialogue, 2009. Watercolor on paper. 77 x 103 cm.

AUTRES EVENEMENTS PHOTO