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Paysages exfiltrés, 2004-2008

06 Nov - 17 Jan 2009
Vernissage le 05 Nov 2008

Les photographies de Guillaume Lemarchal fixent des territoires désertés, souvent des pays de l’est, où restent incrustés des bâtiments évidés de toute fonction. Chargés d’une chape de silence, ses paysages jouent comme des architectures de l’espace et du vide.

Guillaume Lemarchal
Paysages exfiltrés, 2004-2008

Voici l’exposition personnelle d’un jeune artiste français, né en 1974 et représenté en exclusivité par la galerie depuis 2006, qui démontre une subtile et puissante capacité à renouveler la photographie dite « de paysage ».

Il mène des expéditions éclair, plutôt dans les pays de l’est et de préférence quand les terres sont scellés par la blancheur hivernale, pour se saisir d’images de sites bloqués sur des activités secrètes, puis désertées, de brèches hors temps, dans les contrées européennes marquées par l’ombre réfrigérante de l’ancienne URSS, comme autant de questions suspendues : où; quoi, quand ?

Ces territoires en apnée, où restent incrustés sous forme d’objets sculpturaux des bâtiments évidés de toute fonction, sont chargés d’une chape de silence, d’une étrangeté sourde que sa photographie rapporte et tente de décoder.

Son langage est d’abord esthétique mais jamais innocent, car un emploi savant de la visée, du cadrage, de la distance, des plans, des champs, et de couleurs froides, rend à ces lieux leur vocation d’ordre, de pouvoir, de rigueur, et simultanément les en épuise, les débriefe jusqu’à la corde, jusqu’à ce qu’ils aient tout avoué de leur destinée fantôme.

Ses images figent des renoncements, juste avant le pas de trop, celui qui fait passer brutalement de la beauté à la mort, de la vie l’absence.

Face à des paysages exfiltrés, porteurs d’une trouble ambiguïté, d’autres, antérieurs et plus près de chez nous, en France, annonçaient déjà la prédilection de Guillaume Lemarchal pour des états de veille visuelle et mentale qui relèvent du battement de l’obturateur : ouvert / fermé, exprimer / taire, avant / après.

Ses paysages jouent comme des architectures de l’espace et du vide.

Un relevé de terrain, qu’il soit de sable, de sel, de cendres, s’étale ou s’enroule, façonne une mémoire que n’active aucun personnage, une mémoire en attente, sans que l’on sache de quoi.

Ses architectures jouent comme sculptures, là encore, de l’espace et du vide, avec une arrogance frontale que corrige la finesse un peu tremblée de détails, comme les traces d’usure ou les interférences végétales.

L’eau, qu’il s’agisse de l’Atlantique, de la Baltique, d’une simple retenue, ou qu’elle soit en suspension dans l’air brumeux, est une matière photographique noble, un glacis coloré mais évanescent qui révèle et cache à la fois.

Les ciels particpent sans plus de l’ambiance délétère, ou alors leur absence blafarde vient entériner la désolation sèche des sites jusqu’à la corruption de l’idée même de nature, d’habitat, de production, de survie.

La poésie est là, mais comme l’écrit l’artiste, l’effroi n’est pas loin, et cet autre battement vient habiter les images d’une respiration humaine, avec parfois l’esquisse d’une tendresse pour ce qui a été, ou sera, de ces lieux de déni.

critique

Paysages exfiltrés. 2004-2008

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