ART | CRITIQUE

Paysage sous influence

PTsama do Paço
@12 Jan 2008

Au travers d’une vingtaine de peintures et d’une vidéo, Eric Corne représente la vision d’un monde chaotique où les symboles utilisés renvoient irrémédiablement à nos références communes.

Des avions, des tours, des oiseaux, des maisons, des arbres occupent les tableaux-paysages d’Eric Corne. A la fois peintre, curator, professeur et anciennement directeur du Plateau à Paris, cet artiste aux multiples talents peint le chaos du monde contemporain. Ses couleurs vives et ses motifs obsessionnels font écho au sentiment d’insécurité qu’entretiennent les médias en diffusant leur lot quotien d’attentats, de destructions, de pollution. Telle une obsession, cette atmosphère et ces menaces de catastrophes se retrouvent partout: un bateau en naufrage, une forêt en feu, une ville détruite. Même les paysages d’apparence calme sont traversés par une tension est sous-jacente: ciel trop rouge, traits violents, disproportion… l’équilibre ne devrait pas tarder à être perturbé.

Le traitement pictural volontairement naïf, brut et spontané d’Eric Corne sert à traduire l’écroulement d’une société aux références spirituelles faussées. Ce qui pouvait ressembler au premier abord à de simples peintures de paysages ruraux et urbains s’avère être un assemblage d’éléments renvoyant aux propres incohérences de l’Homme et à son autodestruction absurde.

Sur la toile tendue des coulures se mêlent aux traits appuyés, les contours prennent le pas sur le relief, les plans sont peu distincts renforçant ainsi l’impression d’étouffement. Les tableaux sont majoritairement de moyens formats (de 16 x 22 cm à 214 x 254 cm) et les tonalités peuvent rappeler celles du fauvisme où la couleur prend force indépendamment du dessin.

La vidéo Paysage sous influence s’inscrit dans la même thématique de destruction. L’effondrement d’une barre d’immeuble promise à la disparition est filmée en plan fixe. La vidéo forme une composition abstraite faite des particules de poussières issues de l’immeuble en train de devenir symboliquement la ruine d’un monde révolu, notre monde d’hier.

Dans les peintures comme dans la la vidéo, l’homme est absent. Sa présence se résume à un immense cri de Janis Joplin à la toute fin du film. Comme si crier était devenu la seule action possible face au désastre, face cette situation où l’Homme semble ne construire que pour mieux détruire, face à son apparente incapacité à tirer les leçon du passé tragique, face à notre futur incertain.

Dans l’exposition sont encadrées des pages de journaux étrangers sur lesquelles Eric Corne a réécrit à l’encre, lettre par lettre, par-dessus l’écriture typographique. Tente-t-il ainsi de récréer l’Histoire? De se l’approprier pour mieux la réinterpréter? Mais le texte devient illisible et le passé brouillé par cette réécriture.
On est envahi par une impression d’inéluctable fatalité.

Eric Corne
— L’Attente, 2007. Huile sur toile. 35 x 35 cm.
— L’Ombre rouge, 2007. Huile sur toile. 24 x 33 cm.
— Twins, 2007. Huile sur toile. 16 x 22 cm.
— Babel, 2007. Huile sur toile. 148 x 148 cm.
— Red House, 2007. Huile sur toile. 130 x 162 cm.
— The Music, 2007. Huile sur toile.
— Soudain, 2007. Huile sur toile. 27 x 35 cm.
— Où est passé Walt Whitman?, 2007. Huile sur toile. 160 x 200 cm.
— Paysage sous influence, 2007. Huile sur toile. 214 x 254 cm.
— La Maison Jaune, 2007. Huile sur toile. 170 x 220 cm.
— Panorama, 2007. Huile sur toile. 40 x 40 cm.
— Le Naufrage, 2007. Huile sur toile. 38 x 46 cm.
— Effusion, 2007. Huile sur toile. 16 x 22 cm.
— Vue de ma fenêtre, 2006 – 2007. Huile sur toile. 200 x 200 cm.
— Vue de ma fenêtre II, 2006 – 2007. Huile sur toile. 200 x 200 cm.
— Le Guerrier, 2007. Huile sur toile.
— La Cible, 2007. Huile sur toile. 115 x 146 cm.
— Cirdade Tiradentes, 2007. Huile sur toile. 40 x 40 cm.
— Babel Rature : Neue Zürcher Zeitung, 2007. Encre sur papier journal. 37,5 x 52,5 cm.
— Babel Rature: Herald Tribune, 2007. 76,5 x 63,5 cm.
— Babel Rature: Tages Anzeiger, 2007. 37,5 x 52,5 cm.
— Babel Rature: La Repubblica, 2007. 67,5 x 52,5 cm.
— Babel Rature: Danas, 2007. 60,50 x 44 cm.

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