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Pavillonoir

08 Fév - 10 Mar 2008
Vernissage le 08 Mar 2008

La Galerie Sollertis présente les aquarelles d’Yvan Salomone qui rendent compte de détritus industriels, d’espaces ou d’éléments en friche, de déchets de la modernité et de l’activité humaine. En s’intéressant à ces à-côtés, il détourne la pratique de l’aquarelle de ses paysages de prédilection.

Communiqué de presse
Yvan Salomone
Pavillonoir

Yvan Salomone est né et habite toujours à Saint Malo, ville située en Bretagne, à quelques kilomètres à l’est de Saint Brieuc. Assise chez lui, le lendemain de notre rendez vous avec Raymond Hains au café de Flore, je parcourais ses séries de cahiers les plus récents : livres d’artistes magnifiquement construits consignant à la fois des images noir et blanc de ses propres aquarelles parallèlement à un libre flot d’images de référence, des arrêts sur image à des tableaux en passant par des illustrations de livres, des dessins et des photographies.


Puis, soudain, au milieu de tout ceci, une image portant le titre du film de 1971 de Werner Herzog, Fata Morgana. Yvan a vu Fata Morgana pour la première fois en 1977 quand il avait 19 ans mais ne l’avait jamais revu, et n’avait jamais rencontré quelqu’un qui le connaisse. Quelque vingt ans plus tard, tandis qu’il partageait avec des inconnus un taxi roulant à travers les faubourgs de Dakar, lui revint en mémoire le film dont il commençait déjà à douter de l’existence. Il se mit à parler de scènes et d’images dont il commençait à se souvenir, quand un Argentin, compagnon de route assis à l’avant, se retourna vers lui et dit qu’il avait aussi vu le film. L’instant même où il était entré dans un paysage qui rappelait le film de Herzog fût le moment exact où il rencontra quelqu’un qui puisse confirmer son existence. Pourtant, l’impact subliminal sur son travail semble si évident. Quand Yvan a regardé pour la première fois Fata Morgana, il n’était pas encore artiste.


Au final, il a décidé de ne pas étudier dans une école d’art. Il développa son propre style très personnel et ritualisa seul sa pratique artistique quelques années plus tard en utilisant un medium qui est à la fois lié à une tradition bretonne mais aussi méprisé par les artistes : l’aquarelle. On sent qu’il a erré sur les docks de Saint Malo et au-delà, cherchant des détritus industriels et d’autres déchets issus de l’activité humaine, fixant de ses yeux l’entropie mais il est aussi un voyageur du monde. Il m’a dit avoir peint une vache morte – un sujet organique inhabituel chez lui – après en avoir photographié une en Afrique, mais il est clair qu’il n’avait pas de souvenir conscient des images des vaches mortes – suite à la sécheresse – dans le film d’Herzog. De même, le camp militaire algérien sans surveillance, l’avion s’écrasant dans le désert, les dizaines de milliers de barils de pétroles vides dans le désert ou les machines industrielles à moitié construites abandonnées et sans fonction à des centaines de kilomètres de toute habitation doivent apparaître comme fantasmes ou mirages dans les élucubrations subconscientes qui se trouvent derrière certaines images de Salomone.


Le script de Fata Morgana a été écrit comme un film de science-fiction où des visiteurs aliens de Andromeda arrivent sur une étrange planète inhabitée et enregistrent tout ce qu’ils voient. Mais les images que Herzog a trouvé dans le désert furent tellement hallucinatoires et remarquables, et, ne nécessitant aucune narration il ne filma que ce qui l’intéressa au cours de son voyage à travers le désert du Sahara. À un certain moment, tu fixes ton regard sur l’arrivée d’un car entouré par des gens dans un paysage : tout le monde s’affaire et le car fait une manœuvre. Malgré la terrible chaleur et la soif, Herzog a filmé cette scène. Seulement après qu’il eut fini, lui et son équipe se sont dirigés vers le bus pour demander de la glace, mais il n’y avait rien: pas de car, personne et aucun paysage, uniquement des kilomètres de sable plat. C’était un mirage, c’était Fata Morgana. Le car, les gens et le paysage étaient quelque part, mais ils ne savaient pas où : le reflet de l’au-delà. Je suis hantée par l’image d’un garçon tenant un petit renard du désert devant la caméra ; il tient là sans bouger, tous les deux, avant de tirer le fennec sur le sable par une laisse. Je suis hantée par cela, parce qu’aujourd’hui, il me fait penser à Nerval et son homard.

 

Tacita Dean, 2005

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