DANSE | SPECTACLE

On (y) danse aussi l’été | Ef_femininity

10 Juil - 20 Juil 2019

Pièce conjuguant danse contemporaine, performance et talk, Ef-femininity de Marcel Schwald et Chris Leuenberger allie humour et dimension critique. Pour un quatuor creusant le rapport parfois compliqué à la féminité. Là où féminisation et efféminisation ont parfois encore des connotations péjoratives.

Avec Ef_femininity (2018), les deux chorégraphes suisses Marcel Schwald et Chris Leuenberger livrent une pièce pour quatre interprètes. Enfants, tous deux rêvaient déjà d’être plutôt des filles. Un rapport au monde qui s’est ensuite teinté de revendications plus politiques. Pour Ef_femininity, c’est dans la culture indienne, historique et actuelle, que la pièce puise une partie de son énergie. De fait, l’Inde cultive depuis des siècles certaines alternatives culturelles à la binarité des genres sexuels. Et en Inde, Marcel Schwald et Chris Leuenberger ont rencontré Shilok Mukkati (journaliste), Living Smile Vidya (performeuse) et Diya Naidu (chorégraphe). Toutes trois activistes pour la reconnaissance de leur propre féminité. Avec Chris Leuenberger, Shilok Mukkati, Living Smile Vidya et Diya Naidu sont les quatre interprètes d’Ef_femininity. Et de ce travail conjoint découle une pièce entre les styles et entre les genres. Comme une réflexion collective sur le regard de chacun.

Ef_femininity de Marcel Schwald et Chris Leuenberger : performer les féminités

Entre la performance, la danse et le talk, Ef_femininity parle du féminin aussi bien avec des mots qu’avec des gestes. Dans la lignée de la célèbre phrase de Simone de Beauvoir : « On ne naît pas femme, on le devient ». Avec leurs quatre approches différentes, leur quatre sensibilités féminines, les interprètes de la pièce donnent des pistes de compréhension du combat qu’elles se voient obligées de livrer. Le moment où leur propre sentiment d’évidence se heurte au déni de l’autre. L’une d’elles raconte ainsi comment, pendant des années, elle a cultivé sa gestuelle, pour la rendre la plus féminine possible (selon ses propres critères d’élégance, notamment). Jusqu’à ce qu’un homme arrive pour lui expliquer comment être femme. Et le comique (ou pathétique) de la situation réside probablement dans le fait que cette intrusion masculine soit finalement le signe le plus patent de la reconnaissance de son statut de femme.

Féminité, hyperféminité, efféminisation… Quand la danse sculpte les regards

Avec humour et lucidité, Ef_femininity interroge ainsi des faits comme la féminité, l’hyperféminité, l’efféminement, l’efféminisation. Comme il y a mille et une manières de devenir femme, la pièce convoque aussi les mille et une manières de regarder la féminité. « Certains voit cela avec un regard masculin, certains voient cela avec un regard féminin. Certains voient cela avec des yeux qui prient pour qu’arrive enfin le jour où le genre ne sera plus qu’un hobby ». Face à tous les déterminismes génétiques, qui scellent des destinées avant même la naissance, cette idée de genre-hobby représente un bol d’air. Y compris en Inde, qui connaît un déficit en populations génétiquement féminines du fait d’un grand nombre d’avortements uniquement liés au sexe du bébé. Pièce vive et pluriculturelle, Ef_femininity appuie là où cela fait mal dans la société contemporaine. À savoir sur la plaie de l’identité biologique comme facteur de positionnement social.

Une pièce à découvrir en première française dans le cadre du festival On (y) danse aussi l’été !, aux Hivernales – CDCN d’Avignon, en marge du Festival d’Avignon.

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