ART | EXPO

Ne rien attendre

10 Avr - 07 Juin 2014
Vernissage le 10 Avr 2014

Il y a dans l'œuvre de Michel Herreria, une volonté de déjouer les stratégies du discours, de rendre lisible les lignes de force qui sous-tendent le réel. Ses œuvres sont des cris, qui nous font vivre le monde brutal, étranger de l’homme enchaîné à ses circonstances; otage de la politique, des normes, du verbe, d’une pensée modelée.

Michel Herreria
Ne rien attendre

Michel Herreria dessine pour rendre visible que le mot «erre», verbe qui ne s’est pas invité par hasard dans son nom. Son travail est une conquête: celle d’une langue liée à la pensée, par le geste.
Michel Herreria erre avec son crayon, pour nous montrer l’intensité en mouvement et qu’il est possible de bousculer les représentations, de les faire bouger. En cheminant dans son travail, nous entrons peu à peu en relation avec ces hommes qui s’étirent de toutes leurs forces, se recroquevillent, se plient, se courbent, se mettent à quatre pattes, se laissent — ou se font brutalement — traverser par des objets.
Ces hommes troués, en cage ou en prison se révèlent, de façon lumineuse, dans la continuité du trait, de l’espace et surtout dans les «objets-prolongations-de-soi», nous faisant ainsi lire et sentir ce que veut dire «se conformer à être des individus représentatifs».

Dans l’exposition «Ne rien attendre» il faut se laisser traverser par la violence de cette impasse, la vivre en temps réel. Ces peintures sont des cris, elles nous font vivre le monde brutal, étranger de l’homme enchaîné à ses circonstances, mais aussi et surtout de l’homme qui ne trouve pas son chez-soi dans La maison dépressive de la politique, qui ne peut pas s’accommoder d’être devenu L’otage des normes, otage du verbe, otage des Discussions qui ne lui disent plus rien, enfin, otage d’une pensée modelée.
Dans ces peintures, la plasticité, le tiraillement, la couleur s’imposent comme une force: par son propre mouvement, l’homme s’ouvre à respirer le dehors qui l’asphyxie. «Ne rien attendre» c’est résister en acte.

Michel Herreria, oppose à la pensée modelée, la pensée faite des mots-de-lait. Il y a un hors-page qui se dessine dans son travail. Comme en creux, chaque œuvre nous fait sentir la présence d’une perte: celle de l’humain. Dans Les Ciments par exemple, la désarticulation, la rupture est physique. Elle invite chaque homme à faire l’expérience de se dépêtrer de ce qui l’empêche d’agir.
Les mensonges sociaux et politiques ne peuvent être questionnés si nous oublions que le saut libérateur est en nous. Ces hommes masqués nous rappellent que, dans le théâtre, le vrai acteur ne porte pas de masque. L’homme est acteur par son jeu, par son pari, par la façon dont il mesure comment il est relié aux autres et aux choses afin de se réinventer. Ainsi peut-il renaître.

Dans La maison dépressive de la politique, cette main entre le dehors et le dedans ne s’accommode pas de la situation. Elle est la main qui dessine pour se révéler contre le mur des réalités assemblées. Le désir d’affranchissement est dans cette rencontre entre l’écriture et l’image. Cette main n’est pas métaphore de la parole, elle est un «mot–chose», soutenue par une colonne sans fin pour nous dire que le temps de l’attente est fini.
«Ne rien attendre» c’est oser ouvrir sa main avide de promesses. Dans le travail de Michel Herreria, cette main se fait mouvement, peinture, errance pour ouvrir l’horizon.

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