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Naomi Fisher

PPierre-Évariste Douaire
@12 Jan 2008

Les encres sur calques de Naomi Fisher sont colorées et fortes. La série des «Ladys» décline un type de personnage féminin perdu dans une nature indistincte, tropicale et périurbaine. Livrées à elles-mêmes, ces nouvelles Éve ne se laissent pas faire, et sont prêtes à livrer une dernière bataille pour survivre.

L’exposition de Naomi Fisher s’ouvre sur un monde que nous connaissons bien désormais, celui d’une nature post-humaine. L’homme plongé dans la jungle redevient animal, instinctif, brutal, sauf qu’ici l’homme est une femme. Cette même fureur se retrouve sous la plume colorée de l’artiste.

Après avoir fait la part belle au «porno chic» et aux peintres «mangas», la nouvelle tendance de la galerie Emmanuel Perrotin — qui vient de s’établir en Floride dans le sillage de l’implantation de la foire de Bâle à Miami — s’attache à une peinture expressive colorée. Les peintres sont souvent très jeunes, guère plus de trente ans.
L’ambition est d’être l’une des galeries parisiennes majeures. Les expositions se succèdent sans forcément se ressembler. Une petite en chasse une plus importante. A la rétrospective sur l’empreinte, avec des moyens muséaux, succède deux one man show de jeunes pousses. L’éclectisme, l’envie et la découverte sont au rendez-vous.

Naomi Fisher semble relever le défi, comme avant elle Daniel Arsham, Bhakti Baxter, Jin Meyerson ou Dana Schutz. Elle appartient à cette jeune garde. Sa peinture ressemble aux travaux exposés depuis un an. Elle est à la fois décomplexée et très énergique. Elle puise sa force dans une nature rebelle. Est-elle représentative d’un nouveau courant d’outre-Atlantique? Peut-être. En tout cas, on y retrouve la force et les tournures que nous avions déjà signalées ici. La touche est aussi libre que rapide. La primauté à la couleur se ressent très fortement.

L’exposition se divise en deux parties: d’un côté des œuvres graphiques, et de l’autre des travaux photographiques. Les premières sont réalisées à l’encre sur calque. Les traits sont dilués, elles ressemblent à des aquarelles tant le traitement est vaporeux, aqueux. Ce sont vers elles que se porte d’abord l’attention, tant elles sont pleines d’énergies primitives. Les tons et les couleurs chaudes prédominent, elles ensoleillent l’ensemble de ces travaux préparatoires. Le tout est bariolé et n’est pas sans rappeler les œuvres graphiques des expressionnistes allemands. On pense, par le traitement des couleurs et les thèmes, à Kirchner. Le mythe du bon sauvage est revisité à l’orée du post-humain du XXIe siècle. Ces calques coexistent avec des clichés représentant les mêmes scènes dionysiaques.

Les poses de ces amazones oscillent entre déchéance et agressivité. A même le sol elles semblent démantibulées comme des mannequins. Ces Barbies destroyed sont plongées dans la jungle avec du rimmel qui bave et des mi-bas velus.
Entre Mad Max et Lost, ces créatures combattantes sont livrées à elles-mêmes. Au lieu de fermer le poing elles brandissent des branches menaçantes. Amazones auto-proclamées, plus par dépit que par volonté, elles agitent la menace du Girl Power. Entre activisme et féminisme, elles se révoltent farouchement contre toute oppression en affichant fièrement une pubescence discrète mais réelle.

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